LUNE
Cartographie et toponymie
Il existe deux façons d'établir une carte de l'ensemble de la Lune. La première consiste à représenter séparément, d'une part, la face visible telle qu'elle est aperçue depuis la Terre, d'autre part, la face cachée, avec le même type de projection. Cette cartographie est commode pour l'astronome amateur, qui retrouve sur la carte exactement ce qu'il voit dans son instrument. Adoptée dès le xviie siècle pour représenter la seule face connue alors, elle présente cependant deux inconvénients majeurs : en premier lieu, les éléments morphologiques situés à la limite des deux faces apparaissent sous une incidence rasante et les petits détails sont invisibles ; en second lieu, ce type de carte accentue l'idée d'une discrimination en deux faces différentes, alors que cette distinction repose seulement sur le synchronisme de la rotation et de la révolution de la Lune, et non sur une différence fondamentale de nature entre les deux faces. On préfère maintenant représenter la Lune comme toutes les planètes, dont la Terre, à savoir par un planisphère où toutes les régions équatoriales et intermédiaires sont figurées avec une projection de type Mercator, et les régions polaires avec une projection de type stéréographique.
Toute la surface de la Lune est aujourd'hui cartographiée avec précision. Les cartes ont d'abord été fondées sur les photographies obtenues par les sondes Lunar Orbiter I, II, III, IV et V, puis sur les images acquises dans différents domaines spectraux par les caméras de Clementine, Lunar Prospector, Kaguya...
Le système des coordonnées est défini astronomiquement à l'aide des axes principaux d'inertie de la Lune. Les pôles sont situés au niveau de l'axe de rotation ; le pôle situé du même côté du plan de l'écliptique que le pôle Nord terrestre est conventionnellement le pôle Nord de la Lune. Le plan de l'équateur est perpendiculaire à cet axe. Remarquons que l'image que donnent de la Lune les lunettes et télescopes est renversée : le nord est en bas, le côté gauche à droite. La définition de l'est et de l'ouest a longtemps été ambiguë : avant l'ère spatiale, certaines cartes étaient marquées ouest à gauche, d'autres à droite. En 1961 fut adoptée la convention dite astronautique : la position des points cardinaux correspond à l'image de la Lune à l'œil nu vue depuis l'hémisphère Nord ; ainsi, le nord est en haut et l'ouest à gauche ; un observateur situé sur la Lune verrait le Soleil se lever à l'est et se coucher à l'ouest, tout comme sur la Terre. Les astronomes ont choisi comme méridien origine celui qui passe au centre de la face visible. Historiquement, les positions avaient d'abord été repérées par rapport à un petit cratère brillant, Mösting A. La détermination précise des coordonnées de ce cratère dans le nouveau système a permis de calculer les coordonnées absolues de toutes les autres formations.
La toponymie lunaire a plusieurs origines. Celle de la face visible date du xviie siècle et est due en partie à Johannes Hevelius et surtout à Giambattista Riccioli et Francesco Maria Grimaldi. Ces astronomes ont donné aux mers des noms de qualités humaines ou de phénomènes météorologiques (Mare Serenitatis, Mare Vaporum...). Ils ont baptisé les montagnes du nom des grands massifs terrestres (Montes Carpatus, Montes Apenninus...). Les cratères ont reçu les noms de savants, d'artistes, de philosophes, d'écrivains (Copernicus, Ptolemaeus...). Le latin, longtemps utilisé pour qualifier les formations lunaires, a été officiellement adopté en 1964.
Sur la face cachée, la toponymie est beaucoup plus récente et date du survol de la Lune par les sondes automatiques. Les plus visibles des traits topographiques ont été découverts[...]
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Écrit par
- Pierre THOMAS : professeur de géologie à l'École normale supérieure de Lyon
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