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MACHINES-OUTILS

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Les origines de la machine-outil

L'histoire de la machine-outil est intimement liée au remplacement de l'homme par la machine pour l'exécution de différentes tâches. Par un cheminement persévérant, celui du progrès technique, la machine a de plus en plus aidé l'homme, accroissant au même rythme son efficacité et son pouvoir d'action, tout en diminuant sa fatigue et sa peine.

Les tâches à accomplir

Ainsi qu'il fut précisé dans l'introduction, les machines considérées ici sont exclusivement celles destinées au travail du métal. Ces machines réalisent la fabrication des pièces désirées, à partir du métal brut, soit par enlèvement de matière, soit par déformation. D'autre part, ces pièces se répartissent en deux catégories principales : celle des pièces de révolution, qui sont les plus nombreuses, et celle des pièces parallélépipédiques.

Les machines utilisées pour l'usinage des pièces de révolution sont essentiellement les tours, sur lesquels le travail est exécuté par des outils de coupe, et les rectifieuses cylindriques, sur lesquelles l'enlèvement de matière s'effectue par abrasion au moyen de meules.

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Pour les pièces parallélépipédiques, on utilise de même des fraiseuses, des raboteuses, des aléseuses et des perceuses, qui font intervenir des outils de coupe, et des rectifieuses planes équipées de meules.

Types et mode d'action - crédits : Encyclopædia Universalis France

Types et mode d'action

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D'autres catégories de pièces et de travaux correspondent encore à d'autres types de machines. La figure représente schématiquement ces différents types et leur mode d'action.

Les origines

L'origine du tour se perd dans la nuit des temps ; on sait seulement avec certitude que certaines de ses applications se situent en Égypte plus de mille neuf cents ans avant notre ère. Le premier tour dont on ait connaissance servait à tourner le bois ; la pièce à tourner était placée entre deux pointes enfoncées dans deux troncs d'arbre placés à une distance convenable. Le mouvement de rotation était obtenu par une corde accrochée par une de ses extrémités à une branche suffisamment flexible, alors que l'autre extrémité, formée en œillet, était mue au pied par l'opérateur.

La mécanique s'est développée grâce aux mécaniciens grecs : Archytas de Tarente, Héron d'Alexandrie, Ctesibius, Archimède (287-212 av. J.-C.). Avec plusieurs autres, ces ingénieurs avant la lettre appartiennent au groupe dit des mécaniciens d'Alexandrie.

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Pour trouver leurs véritables successeurs, il faut attendre l'extraordinaire ingénieur Léonard de Vinci (1452-1519) ; génie universel, il conçut à peu près toutes les machines de travail et en traça les dessins. Il faut citer aussi quelques autres mécaniciens de la Renaissance, notamment Cardan, Salomon de Caus (1576-1626), puis Roberval.

À l'aube du machinisme

Jusqu'au milieu du xviiie siècle, les outils resteront très rudimentaires, et les principales pièces des machines seront en bois, seule matière susceptible d'être façonnée avec les outils à main utilisés alors. Les petites pièces et certains renforts seront moulés ou forgés et ajustés à la main.

La seconde moitié du xviiie siècle va voir l'apparition de machines remarquables. C'est d'abord le grand tour en fer de Jacques de Vaucanson, construit vers 1745, puis la machine du Français Nicolas Focq, construite en 1751 pour raboter les douves de fer composant les corps de pompe de la machine de Marly, enfin la première machine à aléser de l'Anglais John Wilkinson, en 1775, conçue et réalisée pour aléser d'une manière précise et rationnelle les cylindres de machines à vapeur.

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Ainsi donc, nées les premières, conjointement avec la machine à vapeur dont leur histoire est indissociable, les machines-outils à travailler le métal servirent à construire les machines propres à l'exercice de chaque profession.

Formation des premières industries de machines-outils

Origines et évolution de la machine-outil - crédits : Encyclopædia Universalis France

Origines et évolution de la machine-outil

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Si « la puissance d'une nation est conditionnée par l'outillage qu'elle produit », le volume de cette production a, tout au moins au début, dépendu de l'ampleur et de la rapidité de l'industrialisation de cette nation. Il est donc intéressant d'examiner, suivant un ordre chronologique, comment l'industrie de la machine-outil a débuté et s'est développée dans les pays qui ont été, précisément les premiers, touchés par l'industrie. Quelques étapes importantes de cette évolution sont rappelées sur le tableau.

Grande-Bretagne

La domestication de la vapeur étant réalisée, les Anglais commencèrent la construction des machines-outils au début du xixe siècle : ils sont les véritables créateurs de cette industrie.

L' histoire de l'industrie anglaise de la machine-outil a commencé avec Maudslay, déjà connu par le perfectionnement qu'il a apporté au tour parallèle (1797). Professeur remarquable, ce sont ses élèves, et en particulier Clement, Roberts, James Nasmyth et Joseph Whitworth qui sont avec lui à l'origine des premières machines-outils.

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Clement imagina le dispositif d'embrayage de la vis mère des tours par un écrou en deux parties et construisit, en 1820, une raboteuse à deux outils travaillant l'un à l'aller, l'autre au retour. Cette dernière machine avait été précédée par celle que Roberts avait réalisée, trois ans plus tôt, à la lime et au burin.

Outre son marteau-pilon, Nasmyth créa la « limeuse » que Decoster transforma en étau-limeur. Quant à Whitworth, il fut sans conteste le plus brillant de tous ; son nom est lié à la normalisation des filetages, le pas Whitworth ayant été adopté, dès 1860, par tous les mécaniciens anglais avant d'être utilisé dans le monde entier.

L'avènement de la machine-outil eut des conséquences économiques remarquables. La possibilité de faire un travail précis à un prix de revient peu élevé donna une impulsion extraordinaire à l'industrie des constructions mécaniques. Le développement des chemins de fer et de la navigation à vapeur fut particulièrement rapide entre 1830 et 1850, le premier bateau à hélice ayant été lancé en 1836. Les besoins en machines-outils furent tels qu'ils ne purent être entièrement satisfaits.

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Au milieu du xixe siècle, l'industrie anglaise de la machine-outil était en plein essor. Avec Whitworth et ses collègues, elle possédait les meilleurs constructeurs de machines-outils et les meilleurs fabricants d'outils. À l'Exposition universelle de Londres en 1851, les machines-outils anglaises étaient encore les plus nombreuses et les meilleures, mais, à l'Exposition universelle de 1862, on pouvait s'apercevoir combien les progrès avaient été faibles entre-temps.

Déjà, en 1855, le gouvernement britannique avait dû faire appel à l'industrie des États-Unis pour appliquer ses méthodes de travail et équiper son nouvel arsenal d'Enfield avec des machines Pratt & Whitney. Et, lorsque s'ouvrit l'Exposition universelle de Vienne en 1873, les machines-outils anglaises n'étaient plus en état de concurrencer les américaines.

France

C'est vers 1825 que les premières machines-outils britanniques furent importées en France pour équiper les ateliers de constructions mécaniques dont elle avait besoin, car elle entrait alors dans l'ère industrielle. Toutefois l'Angleterre ne pouvant les fournir toutes, des mécaniciens entreprirent de construire pour leurs besoins propres, et en s'inspirant généralement de celles qu'ils avaient fait venir d'outre-Manche, les machines simples dont on se servait à cette époque.

Calva, F. Cavé, F. Decoster, E. Bourdon se révélèrent aussi ingénieux et aussi habiles que leurs illustres prédécesseurs du xviiie siècle. Leurs progrès auraient été cependant plus rapides encore, si les besoins avaient été plus grands. Les machines-outils étaient alors construites à l'unité, souvent sur mesure.

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Enfin, comme aux États-Unis, ce furent des fabrications d' armement qui rendirent possible l'exécution de séries plus importantes : machines diverses construites par Decoster pour la manufacture d'armes de Châtellerault (1856), tours parallèles Colmant pour le fusil Chassepot (1867), machines à fraiser Bariquand (inspirées des modèles Brown & Sharpe) d'abord pour le fusil Gras (1872), puis pour le fusil Lebel (1885), tandis que Elwell, puis Leflaive fournissaient aux arsenaux de la marine de très grosses machines. Cependant, en 1865, le gouvernement français créait l'atelier de construction de Puteaux, dirigé par F. G. Kreutzberger, établissement « destiné à la fabrication des machines-outils nécessaires aux arsenaux français et étrangers et précédemment livrées par l'industrie privée ».

États-Unis

L'industrialisation des États-Unis n'en était encore qu'à ses débuts avant 1840, mais, dès 1850, son industrie métallurgique prenait la seconde place dans le monde.

La population du pays, passant de 31 millions d'habitants en 1860 à plus de 76 millions en 1900, avec un niveau de vie de plus en plus élevé, exigeait des productions de biens de consommation considérables et la guerre de Sécession exigea d'importantes fournitures d'armes et de munitions.

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De tels débouchés entraînèrent un accroissement de la production des machines-outils ; dans le même temps, l'exécution de séries de plus en plus grandes de pièces de plus en plus précises faisait naître des machines semi-automatiques, puis des machines automatiques, ainsi que des machines de finition (machines à rectifier) et des procédés nouveaux d'usinage (brochage) ; le taillage des engrenages réalisait aussi d'importants progrès.

Tout cela se fit à l'abri d'un tarif douanier fréquemment majoré, entre 1860 et 1896.

Dans le même temps, pendant plus de vingt années, F. W. Taylor poursuivait ses études sur la coupe des métaux, études qui devaient aboutir, en 1898, à l'invention de l'acier rapide présentée à l'Exposition universelle de Paris de 1900 sous la forme d'un outil de tour.

Manufacture d'armes, XIX<sup>e</sup> siècle - crédits : Hulton Archive/ Getty Images

Manufacture d'armes, XIXe siècle

Après avoir pris pied en Grande-Bretagne (équipement du nouvel arsenal d'Enfield) et en France à l'occasion de l'Exposition universelle de Paris en 1867, les constructeurs américains ravirent peu à peu, en Allemagne, la place qu'occupaient leurs concurrents anglais (rénovation de l'outillage des manufactures d'armes en 1872).

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En 1877, on comptait 44 constructeurs de machines-outils ; les dix plus importants employaient, à eux seuls, 1 560 personnes et, en 1902, 9 845 (sur un total de 25 000 pour 150 entreprises).

En 1914, 285 usines, dont la moitié employaient moins de 50 personnes, occupaient 32 230 ouvriers et employés.

Allemagne

Il fallut presque attendre la seconde moitié du xixe siècle pour voir apparaître des industries allemandes ; les éléments des premières lignes de chemins de fer, avec leur matériel roulant, furent livrés par l'Angleterre ; en 1840, la longueur du réseau ferré n'atteignait pas 500 kilomètres.

La fabrication des machines à vapeur et celle des locomotives commença vers 1840 ; quelques années plus tard, les premières machines-outils sortaient de l'atelier Zimmermann, mais, en fait, ce ne fut que vers 1860 qu'une production faible mais régulière s'organisa pour concurrencer les fournisseurs étrangers.

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À la fin de 1875, le parc de machines-outils de la Prusse formait un total de 41 000 machines environ. La plus grande partie de ces machines était d'origine étrangère, mais les exportations commencèrent peu après et, en 1900, elles avaient dépassé les importations.

Cependant, pour conserver leur marché intérieur, les constructeurs allemands avaient créé, en 1898, un syndicat dont l'un des objets était d'obtenir une protection douanière plus efficace. Cette protection permit d'obtenir la cession de licences de fabrication étrangères : en 1905, Loewe, par exemple, acheta à Norton les plans de sa machine à rectifier et à Rice ceux de sa machine à percer. Dès lors, la production des usines allemandes de machines-outils ne cessa de croître et cette industrie devint très vite une des branches les plus importantes et les plus actives de la mécanique allemande.

Leur production rattrapa d'abord celle de la France, puis celle de l'Angleterre et enfin celle des États-Unis. Leurs exportations montèrent en flèche, passant de 9 267 tonnes en 1900 à plus de 74 000 tonnes en 1913, soit 40 p. 100 des livraisons totales.

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Écrit par

  • : diplômé du Conservatoire national des arts et métiers, ancien ingénieur en chef de la Société H. Ernault-Somua (Recherche et développement)
  • : ancien élève de l'École polytechnique, secrétaire général de la société Ernault Toyota-Automation

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Types et mode d'action - crédits : Encyclopædia Universalis France

Types et mode d'action

Origines et évolution de la machine-outil - crédits : Encyclopædia Universalis France

Origines et évolution de la machine-outil

Manufacture d'armes, XIX<sup>e</sup> siècle - crédits : Hulton Archive/ Getty Images

Manufacture d'armes, XIXe siècle

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