WEST MAE (1893-1980)
1926 : la police envahit un grand théâtre de Broadway qui affichait la pièce Sexe. Objet du litige : l'actrice Mae West, qui venait d'être intronisée « grande prêtresse de la sexualité ».
Ce rôle, la comédienne l'a tenu sans défaillance au cours d'une carrière d'une exceptionnelle longévité. Née à New York, elle débute, curieusement, comme une « petite Shirley Temple » dans des spectacles tels que La Case de l'oncle Tom, au début du siècle. Cependant, elle découvre vite qu'il lui est plus facile d'être une « vamp en herbe » qu'une future « petite fiancée de l'Amérique » et paraît sur de nombreuses scènes de vaudeville ou de music-hall aux côtés de vedettes comme Gaby Deslys ou Al Jolson. Elle écrit elle-même les textes de ses revues.
C'est alors qu'elle conçoit et interprète Sexe, qui fait scandale. Elle n'en continue pas moins à monter des spectacles aux titres aussi évocateurs que L'Homme de plaisir, Travestis ou Diamond Lil, qui est adapté au cinéma, sous le titre de Lady Lou (1933), par Lowell Sherman.
Sa première apparition à l'écran au côté de George Raft dans Night after Night (1932) constitue un véritable défi aux conventions hollywoodiennes de l'époque : la quarantaine passée, Mae West impose un personnage outrancier dont les répliques – qu'elle écrit elle-même – jouent déjà sur l'absurde. Les producteurs ne parviennent pas à la classer, le Hays Office crée à son intention une ligue de décence, puisqu'elle affiche et revendique une totale liberté sexuelle. Elle choisit ses partenaires, lance ainsi Cary Grant dans Lady Lou. Les spectateurs, heureusement, commencent à apprécier son humour roboratif. Ses films deviennent de grands succès de box-office et illustrent la politique des studios de l'époque : de meilleurs scénaristes, des décorateurs ou des costumiers comme Travis Benton, qui lui dessine un drapé extravagant et audacieux pour figurer en statue de la liberté (sexuelle) dans Belle of the Nineties de Leo Mac Carey (1934). Pourtant, aux yeux des censeurs, l'esprit semble présenter une plus grande subversion que le corps puisque plusieurs de ses dialogues sont impitoyablement coupés.
On attendait beaucoup de la rencontre entre Mae West et W.ƒC. Fields, dans le film My Little Chickadee (Mon Petit Poussin chéri, 1940), mais il ne semble pas que ces deux marginaux du cinéma se soient bien entendus. D'une carrière portée par le personnage que Mae West s'était créé, retenons encore Je ne suis pas un ange (1933), de Wesley Ruggles, Annie du Klondike (1936), de Raoul Walsh et, la même année, Go West Young Man d'Henry Hathaway.
Dans les années 1950, les rôles de femmes évoluent : Mae West se tourne alors vers d'autres activités, théâtrales ou discographiques. On la verra même en meneuse de revue à Las Vegas, faisant parader des culturistes-objets. Elle écrit aussi son autobiographie, qu'elle intitule La bonté n'a rien à voir là-dedans. Dans les années 1970, on la revoit au cinéma avec Myra Breckenridge (1970), de Michael Sarne, où elle tente de réitérer son exercice de panthère blonde, et Sextette (1978), de Ken Hugues, tiré de sa pièce Sexe, où elle se contente de figurer auprès de stars des années 1930 ou 1940.
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Écrit par
- André-Charles COHEN : critique de cinéma, traducteur
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