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OLIVERO MAGDA (1910-2014)

Mieux qu’une grande voix : une légende. La soprano italienne Magda Olivero a su, au cours d’une carrière d’une remarquable longévité, préserver une exceptionnelle maîtrise du souffle, la saveur de son timbre, une dynamique sans faille sur toute l’étendue de son registre et une autorité théâtrale affirmée. Sage et rigoureuse dans le choix de ses rôles, elle a côtoyé les grandes voix du début du xxe siècle – Aureliano Pertile et Carlo Galeffi – mais aussi les étoiles montantes de la nouvelle génération comme Alfredo Kraus, Luciano Pavarotti et Placido Domingo.

Magda Olivero naît le 25 mars 1910 à Saluzzo (Piémont). À Turin, elle étudie le piano, l’harmonie et le contrepoint avec Giorgio Ghedini. Luigi Gerussi et Luigi Ricci lui bâtissent une technique vocale parfaite. Toujours à Turin, elle fait en 1932 ses débuts à la radio dans I misteridolorosi de Nino Cattozzo. Dès 1933 la Scala de Milan l’appelle et lui confie les héroïnes de Verdi – Gilda (Rigoletto) et Nannetta (Falstaff) –, de Puccini – Mimi (La Bohème), Liù (Turandot) et le rôle-titre de Madame Butterfly –, ainsi que la figure de Sophie (Le Chevalier à la rose de Richard Strauss). Elle se distingue sous les traits des deux Manon (celle de Massenet et celle de Puccini) et des deux Marguerite (Faust de Gounod et Mefistofele de Boito). Elle est alors l’interprète élue du répertoire vériste et de la jeune école italienne. Elle chante Risurrezione, La leggenda di Sakùntala et Cyrano de Bergerac de Franco Alfano, ainsi que La vedovascaltra d’Ermanno Wolf-Ferrari. En 1938, elle crée La caverna di Salamanca de Felice Lattuada. Elle triomphe en 1939 dans ce qui deviendra très vite son incarnation fétiche : Adriana Lecouvreur de Francesco Cilea. Sa prestation y était jugée « inapprochable » par Maria Callas qui évita toute confrontation. Magda Olivero se marie en 1941. Elle quitte alors la scène et ne se produit plus qu’au bénéfice de manifestations charitables.

Répondant au désir d’un Cilea mourant, elle accepte en 1951 de revenir à l’opéra. Elle reprend son répertoire ancien mais l’enrichit d’emplois plus dramatiques. Puccini y est toujours à l’honneur avec Il tabarro (Giorgetta) et Tosca, en compagnie désormais de Fedora d’Umberto Giordano, Francesca da Rimini de Riccardo Zandonai, Médée de Luigi Cherubini, Iris de Pietro Mascagni et du personnage de Flora (The Medium de Gian Carlo Menotti). Elle triomphe sur les plus grandes scènes européennes (Paris, Bruxelles, Amsterdam, Londres, Edimbourg) et commence, à soixante-cinq ans, une fulgurante carrière aux États-Unis avec une Tosca osée en 1975 au Metropolitan Opera de New York. Elle fait en 1981 ses adieux à la scène avec La Voix humaine de Francis Poulenc dont elle avait assuré la création en Italie.

Les studios, accaparés par la rivalité entre Maria Callas et Renata Tebaldi, ne se soucient guère d’offrir à Magda Olivero la place qu’elle mérite. Sa discographie officielle reste squelettique : deux opéras complets – Turandot et Fedora – et quelques albums d’airs isolés. De rares et précieux enregistrements publics préservent cependant le souvenir de l’une des plus grandes artistes lyriques de son temps : une Manon Lescaut de Puccini avec le jeune Placido Domingo et surtout, captée en 1959 au Teatro San Carlo de Naples, une représentation d’Adriana Lecouvreursous la direction de Mario Rossi, où, remplaçant au pied levé Renata Tebaldi souffrante, elle était entourée par Franco Corelli, Ettore Bastianini et Giulietta Simionato. Cette grande dame meurt à Milan le 8 septembre 2014.

— Pierre BRETON

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