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ARNODIN MAÏMÉ (1916-2003)

Au début des années 1960, la Française Maïmé Arnodin a inventé un nouveau métier dans la mode, en montant le premier bureau de style couplé à une agence de publicité. Elle le fit dans l'enthousiasme, avec le projet d'une vie meilleure, plus dynamique, plus esthétique, et correspondant mieux à la vie des femmes telle qu'elle la voyait arriver. Elle était née Maïmé Hentsch, en 1916, dans une famille de banquiers protestants. Après ses études à Versailles, au collège d'Hulst, première originalité : elle entre à l'École centrale des arts et manufactures, dont elle sort en 1939 avec un diplôme d'ingénieur et un fiancé, Félix Arnodin. Ils se marient en 1940 et auront trois enfants, mais Félix Arnodin meurt très jeune, en 1949. Maïmé entre alors au Jardin des Modes, formée au pas de course par son directeur, Lucien Vogel. En 1956, elle est directrice de la publication, où elle inaugure une rubrique de prêt-à-porter – ce qui n'existe alors ni dans la presse féminine, ni dans ce titre en particulier, consacré à la haute couture et aux patrons papier.

Très vite, Maïmé Arnodin comprend que la mode de la rue, le prêt-à-porter, doit être créé par de jeunes gens ; elle fait donc engager Emmanuelle Kahn, Christiane Bailly et Gérard Pipart par des confectionneurs, tout en s'appliquant à moderniser le journal, refusant par exemple qu'une bonne photo justifie la parution d'un modèle médiocre. En quittant le Jardin des Modes en 1958, elle prend la direction des ventes au Printemps, puis, en 1960, monte sa propre structure de conseil aux entreprises de prêt-à-porter. Elle y crée des cahiers de coloris qui prévoient le changement des palettes de couleurs. En 1968, elle monte, avec sa compagne Denise Fayolle, une agence de publicité et de style appelée Mafia (Maïmé Arnodin Fayolle International Associées). Elles font entrer la mode dans l'ère de la production et de la communication de masse. C'est l'époque où le mot et le concept de design font leur apparition. « Le style, écrit Maïmé Arnodin, c'est ce qu'on a envie de porter. Il n'y a pas un style mais des styles, et le choix est une question de culture. » Son exemple est à l'origine de bien des vocations, de bien des réussites. À Mafia, les deux associées rajeunissent le catalogue des 3 Suisses et y font vendre des modèles de créateurs : Agnès B., Jean Paul Gaultier, Alaïa. Les campagnes de presse pour Absorba, les croquis enlevés des pages Babyliss, par-dessus tout, les images, les slogans inventés pour les parfums Yves Saint Laurent restent dans les mémoires, tel « Opium. Pour celles qui s'adonnent à Yves Saint Laurent », avec la photo de Jerry Hall par Helmut Newton, ou encore la jeune battante portant l'eau de toilette « Rive gauche : Pas pour les femmes effacées ». En 1985, Maïmé Arnodin et Denise Fayolle vendent Mafia à l'agence de publicité B.D.D.P., mais elles la quittent deux ans plus tard pour ouvrir une nouvelle structure, baptisée Nomad. Les activités reprennent, en particulier avec La Redoute, à qui les deux associées font vendre par correspondance un modèle d'Yves Saint Laurent, le fameux smoking.

Maïmé Arnodin et Denise Fayolle sont de ces femmes qui ont fait progresser l'image au quotidien des Françaises dans la seconde moitié du xxe siècle. Quand, en 1995, Denise Fayolle meurt, Maïmé Arnodin continue de travailler ; elle voyage, va à l'Opéra, au théâtre pour tout ce qui en vaut la peine, aide les artistes autant que les gens de la mode. Dans un milieu professionnel souvent taxé de futilité, elle montre une image différente, à la fois sérieuse et optimiste, gaie, indépendante dans ses jugements, rayonnante. Elle est morte chez elle, dans la nuit du 29 au 30 janvier 2003. Sur sa table de nuit, ses dernières lectures : le livre de souvenirs[...]

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