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SAVOIE MAISON DE

Un grand État médiéval

Ce n'est qu'en 380 qu'apparaît, dans l'œuvre de l'historien latin Ammien Marcellin, le nom de Sapaudia, ou Sabaudia, terme appliqué à l'ancien territoire des Allobroges gaulois à l'exclusion de la Maurienne et de la Tarentaise. On en ignore, au demeurant, la signification. Aux ve et vie siècles, les Burgondes, dont la capitale fut Saint-Maurice d'Agaune en Valais, ont laissé sur place à peine plus d'objets en terre que de documents d'archives. À cette époque se constituent aussi les circonscriptions ecclésiastiques : Tarentaise, Maurienne, abbaye de Saint-Maurice, le reste du pays revenant à Genève, Belley ou Grenoble. Maîtres du Sud-Est jusqu'à la Méditerranée, les Francs de Pépin le Bref émergent de cette période obscure en ouvrant la route, non plus de Milan, mais de Turin et de Rome par le Petit-Mont-Cenis, un millénaire après Hannibal. C'est au ixe siècle que se dessine l'une des lignes de force du futur domaine savoyard : celui-ci fait partie de la Lotharingie dont il suit le destin de la partie méridionale qui a pris le nom de royaume d'Arles ou royaume de Bourgogne-Provence, bientôt vassal de l'empereur d'Allemagne.

L'histoire de la Savoie au Moyen Âge est celle des efforts d'une lignée de princes dont l'âpreté et la continuité de vues ne sont pas sans rappeler celles des Capétiens. On ne sait d'où est originaire le premier, Humbert Blanches-Mains (1027-1048). Son fils, Odon Ier, s'étant allié à la famille de Suse, possède, dès 1040, les deux versants du col du Mont-Cenis, et Amédée Ier, avant le xiie siècle, franchit le Rhône et gouverne le Bugey.

Le génie de ces princes a été jusqu'au xve siècle de louvoyer au milieu de puissants seigneurs (dauphins de Viennois, comtes de Genevois, ducs de Bourgogne, rois de France...) pour se rendre maîtres d'un solide pré-carré en moyenne Lotharingie. Cette politique est appuyée sur la reconnaissance explicite du pouvoir nominal de l'empereur d'Allemagne. Amédée VI est le « vicaire » perpétuel et héréditaire de celui-ci (1365), ce qui lui permet de recevoir l'hommage de tous les évêques depuis Grenoble jusqu'à Lausanne, Amédée VIII sera fait duc en 1416. Le Faucigny a été acquis définitivement en 1355 ; et avec lui, la Bresse de Bourg, le duché de Chablais, le duché d'Aoste, le château épiscopal de l'Île à Genève, Moudon, une bonne partie du pays bernois, Nice et le Genevois (Albanais, Annecy, Saint-Julien). Les domaines des Blanches-Mains sont bien à l'image d'un pays-carrefour, commandant toutes les routes de l'Europe moyenne. Le prestige de ces princes est indéniable. La fille de Thomas Ier, contemporain de Philippe Auguste, Béatrice, épouse du comte de Provence, a été mère de quatre filles qui furent souveraines de France, d'Angleterre, de Naples et d'Allemagne. L'afflux des Savoyards en Angleterre a donné lieu à l'établissement d'une véritable colonie dont le souvenir s'est conservé dans l'hôtel Savoy de Londres. Des entreprises chevaleresques en Orient (siège de Rhodes) suscitent, au xive siècle, des ambitions sur Chypre et Jérusalem. Les comtes, chez eux à Paris, aident les Capétiens contre leurs ennemis (Crécy) et s'intéressent aux querelles italiennes. Il semble que l'apogée de la maison de Savoie ait été atteint par Amédée VIII (1391-1440), gendre du duc de Bourgogne Jean sans Peur. Sage gouvernant, porté à la conciliation, il connut la singulière fortune d'être élu pape sous le nom de Félix V, un anti-pape, il est vrai, et de bonne foi, qui, ayant renoncé à la tiare en 1449, après la résorption du Grand Schisme d'Occident, finit par être évêque de Genève et légat pontifical.

L'expansion audacieuse de la Savoie[...]

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