MAÎTRE DE MOULINS, JEAN HEY dit (actif entre 1480 et 1501)
Le Maître de Moulins, peintre du Triptyque de la Vierge en gloire de la cathédrale de Moulins, est considéré comme le plus grand peintre français actif dans le dernier quart du xve siècle. Il exécuta au moins une douzaine d'œuvres, auxquelles il faut ajouter une miniature pour les Statuts de l'ordre de saint Michel. Il est aussi probable qu'il fit des cartons pour le Vitrail des Popillons à la cathédrale de Moulins. Son identité a été controversée depuis le début du xxe siècle, et c'est seulement dans les années 1960 que les experts se sont accordés à reconnaître en lui Jean Hey, artiste d'origine flamande.
Identification du Maître de Moulins
À en juger par ce qu'on connaît de son œuvre, Jean Hey a dû travailler entre 1480 et 1501, et doit donc être né vers 1450. Les renseignements les plus importants que l'on possède sur cet artiste peuvent être tirés d'une inscription placée au revers de sa seule œuvre documentée, un Ecce Homo (musée des Beaux-Arts, Bruxelles) où il est dit qu'il a peint ce panneau pour Jean Cueillette, notaire et secrétaire de Charles VIII. Puisque Jean Hey est mentionné dans cette inscription comme egregius pictor teutonicus, on peut penser qu'il venait des Pays-Bas. Le même Jean Hey est aussi mentionné dans La Plainte du Désiré de Jean Lemaire de Belges (1504) où il est estimé, avec Jean Perréal (v. 1455-1530), comme l'un des plus grands peintres français, et où tous deux sont comparés à Léonard de Vinci, Bellini et Pérugin. Puisque Cueillette et Lemaire de Belges étaient tous deux au service de Pierre de Beaujeu, duc de Bourbon, et que c'est à la cour de ce dernier, à Moulins, que le Maître de Moulins peignit la plupart de ses œuvres, on a une raison supplémentaire de penser que ce maître est Jean Hey.
Ce que démontre l'étude de son style justifie également cette identification. L'Ecce Homo du musée des Beaux-Arts de Bruxelles est stylistiquement très proche, par exemple, du Portrait du dauphin Charles-Orlant (musée du Louvre, Paris), qui fut peint la même année.
On sait que Jean Hey était en France avant 1483, car il exécuta une Nativité pour le cardinal Jean Rolin (musée d'Autun), qui était chanoine et archidiacre de la cathédrale d'Autun et qui mourut cette année-là. Cette œuvre, qui date probablement de quelques années avant 1483, et d'autres encore, trahissent son origine flamande. Jean Hey connaissait visiblement les dernières œuvres de Hugo Van der Goes qui peut avoir été son maître. L'influence de Van der Goes est manifeste dans ses paysages, dans certaines compositions et, pour la Nativité, dans l'usage de couleurs froides. Les dernières œuvres de Van der Goes, cependant, telles que le Retable Portinari, du musée des Offices, ou La Mort de la Vierge, du musée communal de Bruges, dégagent une intense mélancolie qui est due à l'échelle arbitraire des figures, à un espace irrationnel et à un emploi insolite des couleurs. Les œuvres de Jean Hey sont en revanche plus calmes, et ne décèlent pas la tension qu'on sent chez le maître flamand. Les mains de ses personnages sont souvent levées, les paumes tournées vers l'extérieur, dans un dialogue silencieux et éloquent. En France, Jean Hey assimila le style de Jean Fouquet, notamment ses formes sculpturales. Les enfants que peint Jean Hey, particulièrement l'Enfant Jésus du Triptyque de Moulins, ont la plasticité de l'enfant qu'a peint Fouquet dans le Diptyque de Melun (musée d'Anvers).
Il n'est pas facile de dater les œuvres de Jean Hey entre la Nativité d'Autun et le Triptyque de Moulins qui fut exécuté vingt ans plus tard. On peut déduire quelques dates de l'âge des donateurs. Jean Hey peignit probablement le Portrait de Charles de Bourbon, cardinal de Lyon (Alte Pinakothek, Munich), qui mourut en[...]
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Écrit par
- Sharon KATIC : historien de l'art
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