MALADIES ÉMERGENTES VÉGÉTALES
Les moyens de lutte
La lutte contre les maladies émergentes nécessite un effort de recherche pluridisciplinaire sur de longues périodes et une mise en application coordonnée de mesures sur le terrain. La prévision précise de l'apparition et de la propagation des maladies reste délicate. Deux programmes de recherche illustrent la complexité de la question des émergences et de leur prévision : l'action transversale (épidémiologie animale, humaine et végétale) EpiEmerge et, dans le domaine végétal, le projet Emerfundis.
EpiEmerge, qui a eu lieu de 2003 à 2005, a réuni une centaine de chercheurs qui, s'intéressant aux maladies émergentes chez les plantes, les animaux et l'homme, ont partagé leurs questions de recherche, leurs méthodes d'analyse et leurs résultats. L'originalité de ce programme, piloté par l'I.N.R.A., a été de mettre en contact des spécialistes de domaines très divers (épidémiologie, génétique, médecine, biomathématiques, sociologie, écologie, biologie des invasions, biologie moléculaire) qui ont pu confronter leurs points de vue. Les 15 recommandations émises par les chercheurs concernant les maladies émergentes appellent au renforcement de leur surveillance et de leur détection, et à la poursuite de la modélisation mathématique de leur propagation. Ces objectifs nécessitent la mise en place de dispositifs spécifiques, interdisciplinaires et inter-organismes. Les systèmes de détection « sans a priori » (non spécifiques d'un parasite particulier) et de signalement standardisé des pathologies atypiques permettront de faire face à l'inconnu représenté par les maladies émergentes. Les agents responsables de la veille sanitaire sont incités à consigner les événements « nouveaux ». Plus généralement, les pratiques de recherche scientifique et les pratiques de terrain doivent être harmonisées afin d'éviter la divergence entre recherche et application. Enfin, la coopération internationale (déjà effective au sein d'organismes tels que l'Organisation européenne pour la protection des plantes) et les systèmes d'information globaux doivent être favorisés. La modélisation et le retour sur l'histoire des émergences passées sont des outils d'analyse et de réflexion pour l'avenir à ne pas négliger.
Le projet Emerfundis, quant à lui, mené de 2007 à 2010 et financé par l'Agence nationale de la recherche (A.N.R.) dans le cadre du programme Biodiversité, vise à expliciter les mécanismes de l'émergence de maladies causées par des champignons parasites afin de prédire l'impact des changements globaux sur ces émergences. Impliquant huit équipes de recherche dépendant du C.I.R.A.D., de l'université Paris-Sud et de l'I.N.R.A., il associe des approches théoriques – modélisation, construction et analyse statistique de bases de données des signalements d'émergences de maladies et d'interception de parasites exotiques aux frontières ; analyse statistique des relations entre les maladies forestières émergentes et les évolutions climatiques – et expérimentales – reconstitution de l'histoire des émergences et des hybridations interspécifiques par des méthodes spécifiques de génétique des populations (phylogéographie), comparaison des traits de vie chez des populations parasites natives et introduites. Ainsi, une caractérisation biologique fine des champignons invasifs et, en parallèle, une meilleure connaissance des écosystèmes vulnérables permettront de proposer une typologie des émergences. On pourra ainsi mieux comprendre la génétique évolutive des maladies émergentes – toujours en considérant les parasites en relation avec leurs hôtes –, l'évaluation du rôle joué par le changement climatique, l'hybridation interspécifique des parasites et le passage d'une espèce végétale hôte à une autre dans l'émergence[...]
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Écrit par
- Ivan SACHE : chargé de recherche à l'Institut national de la recherche agronomique (I.N.R.A.)
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