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MALADIES MENTALES

Fréquence des maladies mentales

Les maladies mentales sont-elles plus fréquentes dans telle région, dans telle couche de la population, à certaines périodes plutôt qu'à d'autres ? C'est un problème difficile et controversé en raison des variables multiples qui sont impliquées. Il est l'objet d'une science encore balbutiante : l'épidémiologie psychiatrique.

Une des variables est constituée par le niveau d'exigence de la société. On trouve plus de malades mentaux dans les milieux urbains que ruraux, dans les sociétés en rapide développement que dans celles ayant une relative stabilité. Cela ne signifie pas que ces conditions sociales soient la cause première d'un certain nombre de maladies mentales, mais laisse plutôt entendre que ces conditions révèlent des incapacités adaptatives qui seraient restées sans cela inapparentes, donc pratiquement inexistantes.

Rien ne le montre mieux que quelques statistiques portant sur une des formes les moins sensibles à l'environnement : l'arriération mentale. En Angleterre, en 1906, la Commission royale chargée d'une enquête sur ce point estimait à 4 p. 1 000 la proportion des arriérés. En 1924, une nouvelle enquête officielle (docteur Lewis) estime cette proportion à au moins 8 p. 1 000 en moyenne. Une autre étude de Lewis, en 1929, montre que ces proportions varient suivant l'âge, puisqu'on trouve 25,6 arriérés pour 1 000 habitants entre dix et quatorze ans, contre 1,2 p. 1 000 en dessous de cinq ans. C'est dire que l'exigence scolaire révèle l'arriération qui, dans un milieu non scolarisé, serait restée inapparente.

C'est sans doute la principale raison qui fait parfois prétendre que les malades mentaux sont plus rares dans les pays les moins développés techniquement. Or diverses études épidémiologiques montrent qu'il n'en est rien si l'on ne considère que les cas grossièrement évidents. Par contre, des différences considérables apparaissent si l'on tient compte de troubles plus discrets que révèle la vie dans les cités modernes.

Une étude de Lin (1953), conduite avec méthode, mais ne tenant compte que des cas avérés de toute nature, montre une proportion de 10,8 malades mentaux pour 1 000 habitants. Une étude de Michael (1960), portant il est vrai sur un autre échantillon, mais tenant compte d'une large variété de symptômes psychiatriques, arrive à la conclusion que tous les habitants, à l'exception de 185 p. 1 000, présentent l'un ou l'autre de ces symptômes, soit une proportion de 815 « malades mentaux » pour 1 000 habitants.

Si l'on se fonde sur des données concrètes, on obtient, pour 1 000 habitants de plus de seize ans, un nombre de cas traités dans l'année de l'ordre suivant : environ 3 hospitalisations en service spécialisé, 5 consultations externes, 85 cas psychiatriques vus par les praticiens non spécialisés, soit environ 10 p. 100 de la population.

Des enquêtes sur des échantillons représentatifs ont permis, par ailleurs, de déceler des symptômes névrotiques infracliniques, c'est-à-dire encore inapparents, dans environ 350 cas sur 1 000 habitants. C'est dans cette population en équilibre instable que les variations et les nuisances de la société contemporaine provoquent d'éventuelles recrudescences de cas pathologiques.

Depuis 1960, on constate une diminution assez régulière du nombre des malades mentaux hospitalisés. Cela tient en grande partie au fait que les malades mentaux sont traités de plus en plus précocement et activement, soit en consultation externe, soit en hôpital de jour. Ces traitements précoces permettent d'éviter dans bien des cas l'évolution vers les formes aliénantes.

Plus sûres, sans être mieux expliquées, sont nos connaissances sur les variations du nombre des malades[...]

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Écrit par

  • : psychiatre honoraire des hôpitaux, Paris, professeur émérite à l'Université libre de Bruxelles
  • Encyclopædia Universalis : services rédactionnels de l'Encyclopædia Universalis

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