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LOWRY MALCOLM (1909-1957)

Né le 28 juillet 1909 dans le port anglais de Birkenhead, situé en face de Liverpool, Malcolm Lowry s'engage à dix-huit ans comme steward pour aller jusqu'en Chine, et il interrompt ensuite ses études à l'université de Cambridge pour s'embarquer comme chauffeur sur un cargo. Ce goût des voyages, dont le court roman Ultramarine (1933), est le reflet, le mènera en France, aux États-Unis, au Mexique, au Canada ; mais sa plus grande aventure sera celle de son roman Au-dessous du volcan (Under the Volcano, 1947). Il commence à y travailler au Mexique en 1936 et va le remanier pendant dix ans. En 1941, la première version est refusée par tous les éditeurs ; Lowry la réécrit au Canada, mais il en perd le manuscrit dans un bar ; la troisième version périt dans l'incendie de sa maison, et c'est la quatrième version qui sera publiée à la fois aux États-Unis et en Angleterre, en 1947. Ce roman constitue une somme dont Lowry dit lui-même : « On peut le prendre pour une sorte de symphonie, ou encore une sorte d'opéra, ou même pour un opéra western ; c'est du jazz, de la poésie, une chanson, une tragédie, une comédie, une farce... c'est une prophétie, un avertissement politique, un cryptogramme, un film loufoque et un Mané, thécel, pharès. On peut même le prendre pour une sorte de machinerie : et elle fonctionne, soyez-en sûr, car j'en ai fait l'expérience. »

Divisé en douze chapitres (douze : nombre des heures de la journée, des mois de l'année et chiffre mystique pour la Kabbale), le livre commence en novembre 1939, à Cuernavaca, au Mexique, le jour des Morts, un an exactement après les événements qui vont être relatés dans les onze autres chapitres et qui décrivent la dernière journée du consul anglais Geoffrey Firmin et de sa femme, Yvonne, qu'il retrouve après une pénible séparation. Chacun des lieux traversés par le consul pendant ses pérégrinations alcooliques, depuis le casino de la Selva, ou la cantina El Bosque (allusions à la forêt sacrée de Dante) jusqu'au terrible ravin de Parián, où il meurt, représente une étape dans sa traversée de l'Enfer, le jardin abandonné symbolisant le Paradis perdu, où il cherche en vain à rejoindre sa femme. Ce livre devait d'ailleurs former le volet « Enfer » d'un triptyque, comportant un « Purgatoire » et un « Paradis », que Lowry ne réussit jamais à achever.

Roman de l'alcool et de l'amour impossible, Au-dessous du volcan raconte une histoire pathétique que l'on peut lire à un seul niveau, mais, pour peu qu'on veuille prêter quelque attention aux allusions innombrables que l'auteur y a mises, le livre devient d'une profondeur fascinante. Même si elle lui permet de fuir les souffrances de la vie, la soif d'alcool du consul est d'abord une soif de savoir, une soif métaphysique ; c'est par l'alcool qu'il se fait voyant, dans le sens rimbaldien du mot. Lowry s'explique ainsi : « Dans la Kabbale, l'abus des pouvoirs magiques se compare à l'ivresse ou abus du vin, appelé en hébreu sod, ce qui nous permet l'analogie. L'un des attributs du mot sod implique aussi l'idée de jardin, ou de jardin abandonné, car la Kabbale est parfois considérée comme le jardin lui-même ayant en son centre l'arbre de Vie. »

L'autre grand symbole du roman est celui de la Roue, à la fois cette Grande Roue installée sur la place pendant la fête des Morts, roue du Temps, qui permet de remonter de 1939 à 1938, et roue du Bouddha, qui représente la vie ; elle fonde la structure centrale du roman, dans son mouvement circulaire. Le lecteur est entraîné dans la ronde infernale du consul, ronde ponctuée de phrases refrains : « No se puedevivir sin amar » (« Nul ne peut vivre sans amour »), ou l'obsédante inscription du jardin public : « Ce jardin[...]

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Écrit par

  • : agrégée de l'Université, maître assistant à l'université de Paris-VII

Classification

Autres références

  • ANGLAIS (ART ET CULTURE) - Littérature

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    • 28 170 mots
    • 30 médias
    ...intérieur, et l'art essentiellement autobiographique. S'enfonçant toujours plus avant dans les profondeurs de l'être et de l'enfer (Au-dessous du volcan), Malcolm Lowry poursuit un voyage ivre qui ne finit jamais (Voyage that never ends) sinon par son suicide, en 1957. Les hallucinations intenses du délire...