MANGROVES
Paléogéographie
« Mangroves » paléozoïques ? « Effet mangrove » ou frange littorale ?
En premier lieu, rappelons que l'emplacement des mangroves récentes est strictement le même qui fut occupé par la vie continentale naissante : les premières trachéophytes sortant du milieu aquatique. Milieu alors trop pauvre pour avoir constitué immédiatement le substrat d'une faune privilégiée. Il s'agit tout de même de la frange littorale et de sa pénétration le long des estuaires et des deltas. Ce fut l'affaire de la vie au Dévonien.
La recherche des lignes de rivage a amené à supposer la position de celle-ci surtout à partir du Viséen et particulièrement au Westphalien. Les forêts « houillères » étaient alors préférentiellement en position paralique, c'est-à-dire suivant les rivages, avec leurs lagunes soumises à de fréquentes émersions et immersions, et sous climat chaud. Même le mode de conservation des houilles suggère la mangrove. Certaines vases à Lingules et à Bivalves fouisseurs indiquent aussi la possibilité d'un milieu voisin de l'écosystème à mangroves. En fait, sans aller jusque-là, bien des auteurs ont comparé ces milieux carbonifères aux « swamps », marécages marins de Floride. Les grands rhizomes appelés stigmaria des Lycopodinées arborescentes, souvent retrouvés en place dans les vases marines ou subcontinentales des bassins houillers d'Eurasie ou d'Afrique du Nord, indiquent une tendance à l'installation de « quasi-mangroves ». Nous avons vu que les spécialisations anatomo-physiologiques de ce biotope végétal sont loin, de nos jours, d'être cantonnées à un seul groupe de plantes. Dans les bassins de l'Illinois, on a pu reconstituer des marécages salins de la zone tropicale ou subtropicale, riches en flores variées, auprès d'estuaires, de deltas et de rivages abrités. Dans les vases, y ont été décelées de très riches faunes conservées avec les contours de leur chair (Mazon et Francis Creek) parmi lesquelles se trouvent associées des formes franchement marines pouvant avoir été drossées depuis la haute mer par les tempêtes, et des formes capables de supporter des variations importantes de salinité. C'est dans de telles conditions qu'a été décrit sous le nom d'Amyelon (Cridland, 1964) un ensemble de racines siphonostèles de Cordaïtes pourvues d'une moelle et d'un phloème à aérenchyme communiquant avec des lenticelles : pour cela, il les compare au phloème des Ormes qui poussent dans des conditions particulièrement arides, et même aux pneumatophores des palétuviers modernes.
Cependant, au vu des travaux effectués dans le but de retrouver des mangroves plus récentes, on peut être tenté aussi de rechercher des traces d'Huîtres formant des bancs dans les mers chaudes. L'adaptation à un tel milieu littoral pourrait avoir été à l'origine du passage de certains Aviculopectinidés à fixation byssale à des monomyaires tout à fait ostréiformes : Saharopteria du Viséen, dont on connaît les coquilles depuis le Maroc central, le Sahara mauritanien et occidental et au Sinaï, préfigure les Huîtres de mangroves par l'attachement de sa coquille à un substrat ferme.
Ainsi, pour ce qui concerne le Paléozoïque, il y a de bonnes raisons de penser que des « swamps », marécages littoraux marins de la zone tropicale, ont été peu à peu envahis par les plantes terrestres depuis l'installation du continent des Vieux Grès Rouges. Mais le niveau de spécialisation des Trachéophytes y était encore inférieur à celui de la mangrove.
Apparition des vraies mangroves
Pour discuter de la présence de véritables mangroves, surtout d'associations végétales ayant une signification comparable aux biotopes actuels, on doit d'abord en définir les limites et les extensions possibles, admettre, comme nous l'avons fait pour le[...]
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Écrit par
- Frédéric BALTZER : maître assistant à l'université de Paris-Sud, Orsay.
- Georges MANGENOT : professeur honoraire à l'université de Paris-XI
- Geneviève TERMIER : maître de recherche au C.N.R.S.
- Henri TERMIER : professeur honoraire à la faculté des sciences de Paris
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