MANIÉRISME
Études et théories
Maniérisme et baroque
Au début du xixe siècle, on considérait encore généralement le maniérisme comme un style sans importance historique : c'est ainsi que Heinrich Wölfflin (1888) croyait à une évolution ininterrompue du classicisme de la Renaissance au baroque du xviie siècle, termes qui s'opposaient, pour lui, de façon antinomique, comme le classicisme et le romantisme. Cependant C. Gurlitt (1887) avait déjà décrit une Renaissance tardive avec Michel-Ange. Les artistes de cette époque, pour Alois Riegl (1908), ne sont pas de simples copistes, puisqu'ils ont créé un art original, l'art décoratif. H. Busse (1911) croyait aussi à l'existence de cette période intermédiaire. M. Dvorak (1918), en reprenant magistralement toutes ces intuitions, affirmait l'autonomie du style maniériste : pour lui, tandis que les élèves de Raphaël renouvelaient le langage décoratif, une nouvelle peinture religieuse naissait dont la conception était entièrement opposée au rationalisme naturaliste de la Renaissance. Les données essentielles de cet art sont le mouvement, la fantaisie, le drame, le subjectivisme et l'expressionnisme.
Cette position, brillamment soutenue par Dvorak pour qui l'histoire de la culture est intimement liée à l'histoire des formes, ouvrit le long débat passionné de W. Weisbach (1919-1934) et de N. Pevsner (1921-1928) : le premier soutenant que l'art de la Contre-Réforme est l'art baroque, alors que, pour Pevsner, c'est le maniérisme, dont il valorise, en même temps, certains caractères comme le retour au gothique, par exemple, où, plus tard, G. Weise (1960) verra une caractéristique latente dans tout l'art du xvie siècle (preuve pour lui de son manque d'originalité).
En 1921, Lili Fröhlich-Bum mit l'accent sur une forme esthétique raffinée, différente de la tendance au baroque née de Michel-Ange, celle de l'art pour l'art, issue de Parmesan. En suivant l'influence de Parmesan, elle étudiait un courant stylistique d'une portée internationale qui s'étendait à tous les domaines de l'art.
Le style anticlassique
W. Friedländer, dès 1915, en analysant les caractères essentiels des œuvres du premier maniérisme (irréalisme spatial, allongement des proportions des figures, verticalisme), les interprétait comme une rupture avec l'idéal classique et l'expression d'une révolte contre l'esthétique de la Renaissance. Pour Friedländer, le maniérisme, c'est le style « anti-classique », dont l'origine se situe vers 1520, autour de Rosso, Pontormo et Parmesan dont l'historien valorise ainsi l'importance. Cette position était alors très nouvelle. Du même coup, les œuvres tardives de Michel-Ange (la Sixtine, la chapelle Pauline) deviennent les fondements du maniérisme. On pouvait d'ailleurs aussi saisir les prémices de cet art dans la Renaissance, idée qui sera reprise plus tard et développée par S. J. Freedberg (1961).
Au premier maniérisme succède, selon Friedländer, une phase d'imitation puis, à la fin du siècle, une nouvelle réaction (1930), également originale, mais qu'il appelle anti-maniériste, réaction qui n'a, en fait, que des sympathies pour l'art de la Renaissance ; vers 1580, dans plusieurs centres d'Italie, des artistes, de Federico Barocci à Caravage, élaborent une nouvelle conception esthétique et des thèmes différents d'une importance majeure pour l'art du xviie siècle.
L'intérêt croissant pour le maniérisme en Italie est prouvé par les recherches des historiens, en particulier R. Longhi, par la publication dans l'Histoire de la peinture italienne d'Adolfo Venturi des maîtres jusqu'ici négligés du xvie siècle, par les études de G. Briganti (1940), de F. Arcangeli, de L. Becherucci (1944), de F. Barocchi[...]
La suite de cet article est accessible aux abonnés
- Des contenus variés, complets et fiables
- Accessible sur tous les écrans
- Pas de publicité
Déjà abonné ? Se connecter
Écrit par
- Sylvie BÉGUIN : conservateur en chef au département des Peintures du musée du Louvre
- Marie-Alice DEBOUT : conférencière à l'École du Louvre, chargée de mission au département des Peintures
Classification
Médias
Autres références
-
ALESSI GALEAZZO (1512-1572)
- Écrit par Catherine CHAGNEAU
- 105 mots
Formé à Pérouse, puis à Rome dans l'entourage de Michel-Ange, Alessi introduisit l'architecture maniériste à Gênes et à Milan. Il donna une interprétation du plan central de Saint-Pierre de Rome en élevant Santa Maria di Carignano (1549). En construisant la sévère et monumentale ...
-
AMMANNATI BARTOLOMEO (1511-1592)
- Écrit par Marie-Geneviève de LA COSTE-MESSELIÈRE
- 316 mots
- 3 médias
Après avoir été l'élève du sculpteur Baccio Bandinelli à Florence, Ammannati rejoint Jacopo Sansovino à Venise ; entre 1537 et 1540, il travaille avec lui à la Libreria Vecchia (reliefs de l'attique). Puis il part pour Padoue, où il sculpte notamment une statue colossale d'...
-
BALDUNG GRIEN HANS (1484 env.-1545)
- Écrit par Thomas Wolfgang GAEHTGENS
- 1 305 mots
- 7 médias
En 1517, de retour à Strasbourg qu'il ne quitte plus jusqu'à sa mort, les recherches artistiques de Baldung prennent une nouvelle orientation. Déjà, Le Déluge (Bamberg) de 1516 montre la dualité de son tempérament qui s'exprime dans une composition très animée, avec des couleurs dissonantes.... -
BANDINELLI BARTOLOMEO dit BACCIO (1493-1560)
- Écrit par Encyclopædia Universalis
- 261 mots
- 1 média
- Afficher les 54 références