MANIÉRISME
La peinture
Caractères généraux des œuvres
Toute analyse des caractères généraux de la peinture maniériste s'est révélée impossible en raison de la multiplicité des œuvres réalisées en une très longue période de temps. On ne peut dégager que de grands traits qui valent surtout pour les productions relevant du courant de la maniera :
– Primat du décoratif qui implique des conventions spatiales : juxtaposition des figures, plans superposés, raccourcis et « tours de force » (Domenico Beccafumi, Descente aux limbes, pinacothèque de Sienne).
– Aucune harmonie d'ensemble, ni dans la composition ni dans la couleur (Bronzino, Allégorie, National Gallery, Londres).
– Allongement des formes (Parmesan, Madone au long cou, Offices, Florence).
– Angularité (Rosso, Dépositionde Volterra), ou au contraire style « coulant » (Perino del Vaga, Le Martyre des Dix Mille, Albertina, Vienne).
– Abstraction du dessin, de la couleur ou de la forme, parfois des trois à la fois (Pontormo, Déposition, Santa Felicità, Florence).
– Forme caractéristique : la forma serpentinata qui exagère le contraposto classique (Salviati, Charité, Offices, Florence) et montre la figure sous plusieurs angles différents en des rythmes opposés.
– Beauté des détails : la perfection des objets maniéristes est la confirmation de ce goût profond pour la précision minutieuse (cassette Farnèse, musée de Capodimonte, Naples ; salière de Cellini, kunsthistorisches Museum, Vienne ; casque et armure de parade de Charles IX, Louvre, Paris), l'ornement y répète souvent à petite échelle les motifs mêmes des grandes architectures, mais avec une fantaisie et une constante licence.
Ce style « miniature » est aussi typique du goût maniériste : on le voit en particulier apparaître dans la gravure et le dessin.
Les artistes et les réalisations
Il ne peut être question de citer tous les artistes, mais il est nécessaire de nommer, à propos des principaux centres, les plus importants d'entre eux : on a tendance à admettre aujourd'hui la réalité du courant de la maniera, tel qu'il a été défini plus haut, en relation avec l'art de la Renaissance, précédant une Renaissance « tardive » où se développent diverses formes maniéristes qui impliquent certaines conventions ou formules. Dans un premier survol, il faut donc évoquer rapidement les principaux aspects de ces deux tendances, d'abord en Italie, où sont nées ces formes d'art, puis dans le reste de l'Europe où elles ont rayonné.
Le foyer du maniérisme : l'Italie
Rome
Le rôle fondamental joué par Michel-Ange sur la formation de la maniera et son influence sur les artistes italiens a été souligné par tous les historiens récents : le Tondo Doni (1505-1506, Offices, Florence), le carton de la Bataille de Cascina (1504), la voûte de la Sixtine (1508-1512), qui offraient une conception de l'espace tout à fait personnelle, avec une expression dramatique et dynamique des formes, fournirent aux jeunes artistes d'innombrables motifs d'inspiration. Par la suite, Le Jugement dernier (1541), la Crucifixion de saint Pierre et la Conversion de saint Paul (1542-1550) leur apportèrent des solutions de plus en plus hardies et l'exemple d'un art dont le mysticisme s'écartait résolument du naturalisme de la Renaissance classique.
On pourrait noter chez Raphaël (mort en 1520) une évolution semblable : contrastant avec l'univers équilibré de la chambre de la Signature (1511), la chambre d'Héliodore (1511-1514) et surtout la chambre de l'Incendie (1511-1517), peintes avec la collaboration de ses élèves sous la direction de Jules Romain (Giulio Romano, 1499-1546), montrent une étonnante force dramatique. Dans la Transfiguration (Vatican), on peut constater une rupture totale d'équilibre dans la composition ; de plus, la mimique expressive[...]
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Écrit par
- Sylvie BÉGUIN : conservateur en chef au département des Peintures du musée du Louvre
- Marie-Alice DEBOUT : conférencière à l'École du Louvre, chargée de mission au département des Peintures
Classification
Médias
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