COELHO MANUEL RODRIGUES (1555 env.-env. 1635)
Compositeur portugais, Manuel Rodrigues Coelho est l'organiste le plus fameux du Portugal au tournant des xvie et xviie siècles, dans la ligne de l'Espagnol Cabezón, et après son compatriote Antonio Carreira (1525 env.-1599). Son unique œuvre, les Flores de musica para o instrumento de tecla y harpa (Lisbonne, 1620), « est sans nul doute l'un des recueils les plus beaux et les plus inspirés de musique sacrée et profane pour orgue, clavecin, virginal, clavicorde ou harpe qu'ait produit la péninsule Ibérique au début du xviie siècle », a écrit Santiago M. Kastner, le musicologue portugais à qui l'on doit la réédition de cette œuvre (1959-1961) qui comprend près de cinq cents pages musicales.
Coelho naît à Elvas où, vers 1563, il étudie la musique à la cathédrale. Après avoir été organiste à la cathédrale de Badajoz (1573-1577), il occupe la même fonction à la cathédrale d'Elvas (de 1580 env. à 1602) et puis à celle de Lisbonne (1602-1603) ; il est enfin organiste de la chapelle Royale (1604-1633). Il termine ses Flores de musica en 1617 et prend sa retraite en 1633 ; il meurt vraisemblablement à Lisbonne.
On soulignera la ressemblance du titre choisi par le compositeur portugais avec celui de Frescobaldi, Fiori musicali (1635, Venise). Il faut souligner les étroites relations d'influences réciproques entre l'école portugaise et les écoles anglaise, germanique, italiennes (napolitaine et vénitienne) et française ; ainsi Kastner estime-t-il qu'il y eut un courant d'échanges entre Coelho, Sweelinck, J. Bull, P. Philips, A. Mayone, S. Aguilera de Heredia, Titelouze, N. Corradini, G. M. Trabaci et Frescobaldi, voire S. Scheidt. À côté de vingt-quatre tentos et de quatre Susanas glosadas (variations sur la chanson de R. de Lassus, Suzanne un jour), l'œuvre comprend un grand nombre de versets de musique sacrée (Pange lingua, Ave maris stella, Magnificat, Kyrie). « Cette musique est riche de figures sinueuses et d'ornements, de rythmes bizarres, d'harmonies inattendues, de modulations étranges ; elle n'ignore pas l'ambiguïté modale, elle requiert une grande virtuosité, elle est parfois particulièrement prolixe et use d'une foule de maniérismes dont le but semble être d'accroître les pouvoirs expressifs de la musique et de ses dimensions subjectives » (Kastner). Un nouveau style musical surgissait et la Seconda Prattica de Monteverdi allait naître. On mesure mieux alors l'importance de l'organiste portugais.
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Écrit par
- Pierre-Paul LACAS : psychanalyste, membre de la Société de psychanalyse freudienne, musicologue, président de l'Association française de défense de l'orgue ancien
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