ROSENTHAL MANUEL (1904-2003)
Chef d'orchestre et compositeur français, Manuel Rosenthal a accompli l'essentiel de sa carrière à la radio, où il s'est imposé comme un fervent défenseur de la musique de son temps. Il fut l'un des rares disciples de Ravel, auquel il devait sa grande habileté en matière d'écriture. La notoriété du chef d'orchestre a éclipsé celle du compositeur, même si son nom a fait le tour du monde comme arrangeur de la musique d'Offenbach, avec le célèbre ballet Gaîté parisienne.
Né à Paris le 18 juin 1904 de mère russe et de père français, Emmanuel Rosenthal commence à étudier le violon à l'âge de neuf ans et il est admis au Conservatoire de Paris (1918-1924). Il joue chez Pasdeloup et chez Lamoureux puis entre à l'Orchestre symphonique de Paris. Ses premières compositions sont jouées à la Société musicale indépendante, où Ravel les entend : ce dernier décide de faire travailler le jeune musicien tout en l'envoyant apprendre le contrepoint et la fugue avec Jean Huré. En 1928, il remporte le prix Blumenthal et dirige son premier concert chez Pasdeloup. À la fondation de l'Orchestre national, en 1934, il est percussionniste ; Inghelbrecht le remarque et l'engage comme assistant. Peu après, la radio s'enrichit d'un second orchestre, l'Orchestre radio-symphonique, dont Rosenthal prend la direction, au grand soulagement d'Inghelbrecht, qui trouve ses programmes trop audacieux. Le compositeur s'impose peu à peu avec deux ouvrages lyriques légers très réussis – Rayon des soieries (1930) et La Poule noire (1937) –, les pièces pour pianoLes Petits Métiers (1933), l'oratorioSaint François d'Assise (1936-1939, créé en 1944), le ballet Gaîté parisienne (1938).
Après sa libération en 1941, Rosenthal se réfugie dans la clandestinité. À la Libération, il est nommé à la tête de l'Orchestre national, où il remplace Inghelbrecht, qui a été écarté. De 1944 à 1947, les créations, premières françaises ou premières mondiales s'enchaînent : Bartók, Stravinski, Prokofiev, Britten, Richard Strauss, Henry Barraud, Jean Françaix, Milhaud, Rivier, Mihalovici, Maurice Jaubert, Ibert, Daniel-Lesur... Mais le public et les musiciens se lassent de ses programmes novateurs et il préfère répondre à l'appel des États-Unis. En 1948, il prend la direction de l'Orchestre symphonique de Seattle ; il donne un nouvel essor à cet orchestre, avant qu'un scandale typiquement américain ne l'oblige à regagner l'Europe en 1951 (il avait fait passer pour sa femme celle qui allait le devenir quelque temps plus tard). Il partage alors son temps entre une carrière de chef invité, notamment avec les orchestres de la radio, et la composition. Un troisième ouvrage lyrique à succès voit le jour, Hop Signor ! (1962). Rosenthal est professeur de direction d'orchestre au Conservatoire national supérieur de Paris (1962-1974) et directeur musical de l'Orchestre symphonique de Liège (1964-1967). Il débute au New York City Opera en 1977, au Metropolitan Opera en 1981 (L'Enfant et les sortilèges de Ravel, Les Mamelles de Tirésias de Poulenc et Parade de Satie), fait un retour triomphal à Seattle avec la Tétralogie de Wagner en 1986. Il donne aussi Pelléas et Mélisande à Moscou (1987). En 1994, pour le soixantième anniversaire de l'Orchestre national de France, il dirige encore une partie du concert commémoratif. Véritable mémoire du siècle, il meurt à Paris le 5 juin 2003.
Sa musique, proche du néoclassicisme, brille par son habileté d'écriture, le scintillement et le raffinement de son orchestration : Musique de table, suite symphonique (1941, créée à New York en 1946), Noce villageoise, pour orchestre (1941), Symphonie de Noël (1947), Magic Manhattan (1948), Symphonie en ut majeur (1949), Aeolus, pour quintette à vent et orchestre[...]
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Écrit par
- Alain PÂRIS : chef d'orchestre, musicologue, producteur à Radio-France
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ORCHESTRE NATIONAL DE FRANCE
- Écrit par Alain PÂRIS
- 1 675 mots
- 2 médias
Le 18 février 1934, le ministre français des Postes, Jean Mistler, signe le décret fondant l'Orchestre national, un ensemble de quatre-vingts musiciens dirigés par Désiré-Émile Inghelbrecht. En imposant l'exclusivité, le règlement de l'orchestre remettait en cause la pratique des remplacements,...