VALLS MANUEL (1962- )
Construction d’une personnalité d’envergure nationale
Ses deux mentors, Michel Rocard et Lionel Jospin, retirés de la vie politique, Manuel Valls développe après 2002 une stratégie d’autonomie, faite d’alliances ponctuelles et changeantes, qui l’amène à être fréquemment en porte-à-faux vis-à-vis de la direction du parti. Il multiplie les prises de position iconoclastes, davantage pour entretenir sa notoriété et sa popularité dans l’opinion que pour se constituer des soutiens au sein du PS ou participer à l’élaboration collective des propositions du parti : sur les questions économiques et sociales, il adopte une ligne nettement sociale-libérale. Il appelle à « déverrouiller les 35 heures », à repousser l’âge de départ à la retraite, à refuser « l’assistanat » et prône la modération salariale. Sur les questions d’immigration et de laïcité, il se distingue par des déclarations intransigeantes, tandis que sur les problèmes de sécurité, il préconise des politiques répressives et use d’une rhétorique martiale qui amène Nicolas Sarkozy à lui proposer en 2007 le portefeuille de l’Intérieur dans son gouvernement « d’ouverture » (qu’il refuse). Manuel Valls va jusqu’à suggérer de changer le nom du Parti socialiste, estimant le terme « socialiste » désuet et inadapté à une gauche « moderne ».
Dès 2009, Manuel Valls annonce son intention de se présenter à la primaire qui se tiendra en 2011 pour désigner le candidat du PS à l’élection présidentielle de 2012. Avec environ 5,7 % des voix, il termine cinquième et avant-dernier du premier tour. Il se rallie immédiatement au candidat arrivé en tête, François Hollande. Il devient le directeur de la communication de la campagne du futur président de la République. Ce ralliement précoce lui vaut sans doute d’obtenir le poste très convoité de ministre de l’Intérieur dans le gouvernement de Jean-Marc Ayrault.
Au moment de sa nomination à Matignon, la très bonne cote de popularité de Manuel Valls tranche avec celles du gouvernement et du président de la République, au plus bas. Mais certaines de ses décisions et de ses déclarations lorsqu’il était ministre de l’Intérieur – notamment sur l’intégration des Roms, qui avaient selon lui « vocation à rentrer en Roumanie » –, puis, à Matignon, son empressement à mettre en œuvre une politique de rigueur, l’ont rapidement coupé d’une partie de la gauche associative, syndicale et politique. Dès l’été de 2014, sa ligne politique est publiquement contestée par le ministre de l’Économie Arnaud Montebourg, ce qui l’amène à présenter la démission de son gouvernement le 25 août et à en constituer un nouveau débarrassé de ses « frondeurs ». Les attentats terroristes meurtriers qui frappent Paris en 2015 lui donnent en tout cas l’occasion de rallier une grande partie de la gauche à son discours de fermeté et aux valeurs patriotiques. En revanche, sa gestion de certains dossiers de politique intérieure (adoption de la « loi travail », dossier du burkini…) fait débat, y compris dans son propre camp. Devant l’impopularité grandissante de François Hollande à l’approche de l’échéance électorale, Manuel Valls décide de se porter candidat à la primaire citoyenne organisée en janvier 2017 par le PS et ses alliés en vue de l’élection présidentielle. Dans ce but, il démissionne de son poste de Premier ministre le 6 décembre 2016 et se pose en rassembleur lors de sa campagne, mais il est devancé par le « frondeur » Benoît Hamon.
En 2018, il se retire de la vie politique française et annonce sa candidature aux élections municipales de Barcelone en mai 2019. Manuel Valls est élu conseiller municipal de la capitale catalane, sa liste étant arrivée en quatrième position. En 2021, il démissionne de ce mandat et réapparaît dans le débat public français. Rallié à [...]
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Écrit par
- Blaise MAGNIN : politiste
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