AUBUSSON MANUFACTURES D'
L'existence d'ateliers de lissiers dans la ville d'Aubusson n'est attestée qu'à partir de 1531, date nettement postérieure à celle de l'établissement d'ateliers à Felletin, mais antérieure à celle de Bellegarde ; la production de ces villes voisines a les mêmes caractéristiques. Au milieu du xviie siècle, l'industrie aubussonnaise étant en régression, Louis XIV offre à l'ensemble des ateliers privés le titre de Manufacture royale (1665) et des facilités de travail : un peintre doit être envoyé pour aider à l'exécution des cartons, et un teinturier doit servir de conseiller aux divers fabricants. Ces personnes ne sont envoyées en réalité qu'en 1732 grâce à un nouvel édit (le peintre est Jean-Joseph Dumons, à qui succède Jacques Julliard). Un assortisseur des laines et soies leur est alors adjoint ; le rouge apparaît ainsi dans le répertoire. L'édit de 1732 stipule, en outre, que les lisières des tapisseries doivent être bleues (alors que celles de la ville voisine de Felletin doivent, par un édit similaire de 1742, être brunes) et que la marque du fabricant doit être tissée après la mention « Aubusson ». En réalité, ces règlements n'ont pas été appliqués de façon rigoureuse, et les pièces conservées nous montrent que les manufactures ont préféré mentionner leur titre de Manufacture royale (souvent sous la forme abrégée de MRD ou MRDB). On note que la marque ancienne était un A et un B encadrant la fleur de lys.
Au milieu du xviiie siècle, les maisons sont en plein essor, alors qu'au xixe siècle elles seront obligées de faire des tapis au point noué (« Savonnerie d'Aubusson ») pour pouvoir se maintenir. En 1880, un renouveau d'intérêt pour les arts décoratifs relance légèrement la fabrication, mais ce n'est qu'à partir de 1939 que les efforts conjugués de quelques manufactures et de peintres cartonniers permirent à la manufacture de retrouver une clientèle jusqu'à la fin des années 1970. La ville d'Aubusson ne s'est pas limitée à la fabrication des célèbres verdures dont elle n'a d'ailleurs pas le privilège ; elle a souvent repris les modèles des grandes manufactures : ainsi, les cartons de Le Brun pour les Gobelins ont été interprétés par François Finet à la fin du xviie siècle, et les cartons d'Oudry pour Beauvais ont été envoyés à Aubusson après qu'ils furent devenus démodés, tandis que les cartons de Boucher y ont été copiés. Ces pièces ont un charme rustique qui fait parfois défaut aux tapisseries de plus grande provenance. Mais, depuis les années 1970, une crise liée à la conjoncture économique frappe la tapisserie aubussonnaise, crise qui a entraîné la fermeture de plusieurs ateliers : en 1994, on compte dix-neuf ateliers à Aubusson, dont deux qui se consacrent exclusivement à la restauration, et un seul à Felletin.
Outre la restauration et les reprises d’anciens cartons, les manufactures d’Aubusson ont su jouer la carte de la modernité en favorisant la collaboration d’artistes tels que Jean Lurçat, Calder, Vasarely...
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Écrit par
- Nicole de REYNIES : auteur
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