MARAIS & VASIÈRES
Les marais maritimes
Les marais maritimes constituent de véritables plaines de niveau de base en bordure de la mer, sur les rives des estuaires et entre les bras des deltas. La mer a déposé les sédiments jusque dans le fond des golfes, mais bien souvent il y a eu un déficit sédimentaire dans les anfractuosités du littoral ; les parties les plus élevées des marais maritimes sont ainsi les plus éloignées de la bordure de la terre ferme et les marais présentent une pente contraire, c'est-à-dire qu'ils se relèvent vers la mer. Les parties internes des marais, plus basses, ont un drainage particulièrement mauvais. Aussi ont-elles été le plus souvent occupées par des tourbières (par exemple, « marais noir » du marais de Dol), alors que la partie externe est naturellement mieux drainée et dépourvue de tourbe (« marais blanc » du marais de Dol). Dans d'autres cas, le marais peut présenter une pente très légère vers la mer (pente conforme), mais insuffisante pour un bon drainage naturel. Les marais maritimes, situés au-dessous du niveau des plus hautes mers, doivent être protégés de l'inondation marine par des digues et des vannes. En outre, ils sont en général tributaires des eaux continentales qui s'y déversent.
Les marais maritimes offrent une série de reliefs de détail en relation avec leur genèse, et la moindre dénivellation a des conséquences sur l'occupation humaine dans un pays inondable ; des levées traduisent des phases de stagnation du rivage ; des chenaux de marée sont demeurés en creux ; d'autres sont perchés soit originellement, soit le plus souvent par un phénomène d'inversion de relief : creusés dans la tourbe et colmatés par le sable et la vase, les chenaux ont été mis en saillie lorsque la tourbe conservée dans les interfluves s'est tassée.
La morphologie des marais maritimes dépend aussi de l'intervention humaine qui a dirigé le colmatage par des digues et qui a parfois créé des tertres artificiels pour servir de refuges, au Moyen Âge, tels les terps de Frise.
Les sédiments des marais maritimes peuvent être limoneux ( tangue du marais de Dol, des marais de l'estuaire de la Seine) ou argileux (marais du golfe de Pohai, en bordure de la mer Jaune ; marais de la province néerlandaise de Groningue, au fond du golfe du Dollart, marais Poitevin, etc.). Ces sédiments donnent des sols souvent fort riches, dont le dessalement s'opère rapidement sous l'action des eaux pluviales à partir du moment où des digues empêchent la submersion par la mer. Il est en général possible, sous climat tempéré, de pratiquer, quelques mois après l'endiguement, des cultures qui tolèrent un peu de sel, comme l'orge. Les sols argileux riches en sodium et en magnésium acquièrent une structure prismatique fort marquée lorsqu'existe une alternance climatique de sécheresse et d'humidité. Cette alternance peut même provoquer dans des marais argileux des micro-reliefs, appelés mottureaux dans le centre-ouest de la France.
Isolés de la mer par des digues, les marais maritimes peuvent être drainés par gravité à marée basse seulement (marais de Dol, marais Poitevin) ou plus rarement par pompage (marais de Tønder, au Jutland danois). Certains marais sont inondables par les crues des rivières venant du continent : ce sont les marais de lit majeur, ou « marais mouillés ». D'autres, au contraire, sont isolés hydrologiquement et constituent une catégorie de polders : marais desséchés de la France de l'Ouest, renclôtures de Picardie, polders de Frise... Enfin, certaines parties des marais maritimes ont donné lieu à une spécialisation particulière lorsque les conditions climatiques et économiques étaient favorables : les marais salants.
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Écrit par
- Fernand VERGER : professeur des Universités, directeur de laboratoire à l'École pratique des hautes études
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