BLOCH MARC (1886-1944)
Un profond renouvellement historiographique
Remarquable synthèse, LaSociété féodale, qui paraît en deux volumes (en 1939 et en 1940) chez Albin Michel dans la collection « L’évolution de l’humanité » de Henri Berr, est conçue comme l’analyse d’une structure sociale (un type social) et de ses liaisons. En d’autres mots, Bloch étudie les conditions générales du milieu social dans l’Occident médiéval, et la formation des liens féodaux, puis le développement des classes sociales et l’organisation des gouvernements. C’est aussi l’histoire de l’émergence d’une classe nouvelle, la bourgeoisie, qui marque l’affaiblissement et l’effacement des traits les plus spécifiquement féodaux de la civilisation occidentale. Le chapitre intitulé « Façons de sentir et de penser », très original pour l’époque, a souvent été le plus retenu par les historiens des mentalités, alors que Marc Bloch s’est aussi intéressé à la place de la mémoire collective en dialoguant avec Maurice Halbwachs, ainsi qu’à la durée, aux mentalités religieuses, à la renaissance intellectuelle, croisant conditions de vie et atmosphère mentale.
Si elle se compose d’assez peu d’ouvrages, l’œuvre de Bloch est immense par son originalité et son influence, y compris dans sa lecture attentive des travaux historiques de son temps. Dans les Annales d’histoire économique et sociale, il poursuit une critique certes acérée mais constructive des travaux d’histoire sociale et économique. Il avait déjà commencé ce travail analytique dans la Revue de synthèse historique, ainsi que dans la Revue historique, où il a longtemps tenu la rédaction des « Bulletins historiques » sur l’historiographie allemande, au sein desquels il a proposé une lecture critique de très nombreux ouvrages. Dans les années 1960, la publication en deux volumes de Mélanges historiques a mieux révélé la diversité de ses champs de recherche sur les sociétés médiévales et la vie rurale, l’économie mais aussi les techniques, tout en confirmant la profondeur de ses réflexions sur l’histoire et le métier d’historien.
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Écrit par
- Bertrand MÜLLER : directeur de recherche au CNRS
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