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DASSAULT MARCEL (1892-1986)

Maître d'un vaste empire industriel, homme d'affaires talentueux, patron de presse passionné, producteur de cinéma, parlementaire, Marcel Dassault était entré de son vivant dans la légende. Pendant plus de soixante-quinze ans, il a consacré l'essentiel de son activité à réaliser les « beaux avions » qu'il n'a cessé d'imaginer depuis que, jeune adolescent, il avait vu s'envoler, du terrain d'Issy-les-Moulineaux, les machines de bois et de toile de Voisin, Blériot, Farman et autres pionniers de l'aviation.

Derrière une silhouette frêle, le chapeau mou, le pardessus et un cache-col en toutes saisons, Marcel Dassault abritait une énergie peu commune et une étonnante vitalité. Cet admirateur de la comtesse de Ségur et de Paul d'Ivoi, ce naïf, vrai ou faux, amoureux des bons sentiments, qui ne se séparait jamais du trèfle à quatre feuilles ramassé en 1939, a connu deux guerres mondiales, la déportation, et a vu son entreprise nationalisée deux fois.

Quatrième fils d'un médecin généraliste, qui avait quitté Strasbourg pour s'installer à Paris après l'annexion de l'Alsace-Moselle, Marcel Bloch – il ne se fera appeler Dassault qu'après la Libération – naît le 22 février 1892 à Paris.

C'est un enfant chétif, à l'esprit curieux, dont la vocation sera stimulée lorsque ses parents lui offrent, pour ses dix ans, une boîte d'expériences électriques. Après des études classiques au lycée Condorcet, il s'inscrit à l'école d'électricité Bréguet, dont il obtient le diplôme d'ingénieur, puis entre à l'École nationale supérieure d'aéronautique qui vient de se créer.

Durant la Première Guerre mondiale, il travaille pour l'armée avec son ami Henri Potez ; c'est ainsi qu'il entreprend la fabrication d'une hélice en bois, baptisée Éclair, qui équipera rapidement de nombreux avions, dont le Vieux-Charles de Guynemer. Toujours avec Potez, il se lance dans la construction d'un prototype, le Sem 4, dont le gouvernement commande mille exemplaires, mais l'armistice arrive qui rend le contrat sans objet.

Après la guerre, le jeune ingénieur abandonne l'aviation et s'intéresse à l'immobilier, il achète des terrains fait construire des immeubles, mais la création du ministère de l'Air le ramène à sa première passion. Albert Caquet, directeur technique de la nouvelle administration, lui commande un trimoteur postal, puis il se lance dans la construction d'un petit avion sanitaire. Le constructeur s'installe à Boulogne-Billancourt puis à Courbevoie, recrute du personnel car il élargit sa gamme ; les prototypes se succèdent, aussi bien civils que militaires. En 1936, le gouvernement de Front populaire décide la nationalisation de l'industrie aéronautique. Marcel Bloch reçoit une importante indemnité et reste à la tête de son entreprise, qui a changé de nom, en tant que conseiller et, surtout, il crée, avec Henry Potez, à Saint-Cloud, un bureau d'études privé qui devient le point de passage obligé de l'aéronautique. C'est dans les bureaux de Saint-Cloud que sont élaborés les plans du Bloch-200, avion de chasse que certains qualifièrent de « cercueil volant », et du quadrimoteur Languedoc-161 qui effectuera son premier vol le jour où les Allemands entreront dans Paris.

Emprisonné dès octobre 1940 par le régime de Vichy, Marcel Bloch ira de prison en prison ; la Gestapo l'incarcère en mars 1944 à Montluc, puis le transfère en juillet 1944 à Drancy qu'il quitte le 19 août, à bord du dernier train de déportés pour l'Allemagne. Dans le camp de Buchenwald, où il va passer huit mois, il semble promis à une mort rapide mais cet homme d'une trempe exceptionnelle, soutenu par les communistes regroupés autour de Marcel Paul, va survivre.[...]

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