POLO MARCO (1254 ou 1255-1324)
Le Livre de Marco Polo
Le manuscrit original du Livre de Marco Polo est perdu, mais il reste un grand nombre de textes anciens en langues romanes, connus sous les titres de Le Devisement du Monde, Le Livre des merveilles du monde, Il Milione. Au xxe siècle, la découverte d'une version plus longue mais dûment authentifiée – version dite de Ramusio – a donné un nouvel essor aux études sur Marco Polo.
Le Livre de Marco Polo se divise en trois parties : le voyage d'aller par l'Asie Mineure et l'Asie centrale avec de brèves descriptions des villes et des caractéristiques de leurs habitants ; le séjour dans l'Empire mongol des Yuan, qui donne lieu à de longs développements ; le voyage de retour par les mers du Sud et l'Inde, avec des digressions sur le Japon et les côtes africaines. Marco Polo ne cherche pas à présenter une géographie de l'Asie, mais à raconter ce qu'il a vu ou entendu dire d'intéressant. Il se passionne pour la faune des pays qu'il traverse, relevant l'existence des animaux inconnus ou étranges, et faisant une description très détaillée et vivante des chasses mirifiques de l'empereur Kubilai. Il dépeint longuement les villes et leur architecture : Bagdad, Pékin et surtout Hangzhou, l'ancienne capitale des Song, avec ses palais et ses maisons, ses temples et ses tombeaux, ses routes, ses canaux et ses ponts. Pourtant, plus qu'aux objets sa curiosité va aux hommes et à leurs civilisations. Il ne manque jamais de préciser la religion, l'appartenance politique, la langue, les coutumes et les activités essentielles des populations qu'il rencontre. Comme pour tout chrétien du Moyen Âge, les problèmes religieux sont fondamentaux. Marco Polo s'étonne de la diversité des croyances et de la profonde tolérance qui règne dans l'empire mongol : autour du palais impérial se dressent temples bouddhiques, monastères taoïques, églises nestoriennes (plus tard la cathédrale catholique), temples manichéens, lamaïques qui, tous à égalité, essaient de s'attirer les bonnes grâces du souverain.
Ayant travaillé pendant de nombreuses années pour le gouvernement mongol en Chine, Marco Polo connaît particulièrement bien l'empire Yuan, son système politique, militaire et économique. Plusieurs chapitres sont consacrés à l'épopée des gengiskhanides, ainsi qu'à l'organisation des armées, qui fit leur puissance. Sans cacher son profond attachement pour le grand khan Kubilai, il décrit le faste de sa vie quotidienne, tant à la cour de Pékin qu'à sa résidence d'été. Les grandes fêtes qui ponctuent l'année sont l'occasion de festins grandioses où la profusion et la valeur des cadeaux faits à tous les vassaux, robes de brocart, bijoux, fourrures, soieries, firent rêver bien des lecteurs. Le Vénitien, lui, n'ignore pas les sources de revenus de l'empereur et les recettes immenses qu'il tire de l'exploitation des pays conquis, surtout de la Chine du Sud : impôts divers, monopoles, taxes commerciales. Certaines institutions chinoises, conservées par l'empire Yuan, suscitent son admiration : le système des postes, avec hôtels et relais d'État, l'organisation des pompiers dans les grandes villes, le recensement de la population urbaine, le papier-monnaie, l'organisation des marchés urbains et de la voirie.
Les contemporains de Marco Polo crurent que celui-ci avait fait œuvre d'imagination et ne soupçonnèrent pas que ses récits recouvraient une réalité. Les précisions géographiques qu'il apportait ne furent pas prises en considération, et ce n'est qu'au xve siècle qu'elles furent largement utilisées dans le domaine de la cartographie.
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Écrit par
- Delphine BAUDRY-WEULERSSE : maître assistant de littérature chinoise à l'université de Paris-VIII
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