MARGES CONTINENTALES
Les marges continentales passives de divergence
Aux marges actives, on oppose généralement les marges passives, ou stables, qui sont des régions calmes, sans manifestation géodynamique perceptible. Mais, en réalité, les marges passives sont très différentes selon qu'elles sont construites sur une ancienne faille transformante (cf. Les marges de coulissage) ou sur une ancienne frontière de plaques divergentes.
On distingue sur les marges passives de divergence (ou marges d'arrachement) trois grandes unités morphologiques. Bordant la côte, la plate-forme continentale (ou plateau continental) est large de 70 kilomètres en moyenne, peu profonde (de 0 à 200 m) et doucement inclinée vers le large. Successivement émergée et submergée au rythme des glaciations (régressions) ou des déglaciations (transgressions) de l'ère quaternaire, la plate-forme conserve les traces de phases successives d' érosion ou de sédimentation. En période de haut niveau marin, comme c'est le cas à l'époque actuelle, la plate-forme progresse par le dépôt frontal de couches meubles qui construisent ainsi un prisme sédimentaire « progradant ». Un peu plus au large, la pente continentale s'étage entre 200 et 3 000 ou 4 000 mètres de profondeur ; sa déclivité est de 7 p. 100 en moyenne. Elle est entamée, souvent profondément, par des vallées ou des canyons sous-marins, par où transitent les sédiments. Enfin, le glacis continental est situé en eau profonde (de 3 000 à 5 000 m), à cheval sur la croûte continentale amincie de la marge et la croûte océanique. Là viennent s'accumuler les sédiments transportés depuis le continent via les canyons. Ainsi se construisent notamment les deltas sous-marins profonds, où se reconnaissent les chenaux et leurs méandres, des levées latérales bordant les chenaux, et des glacis profonds qui se raccordent à la plaine abyssale océanique.
Le « rifting » et la naissance des marges passives de divergence
Les marges passives de divergence (ou d'arrachement) gardent la mémoire du stade initial de la dérive continentale, lorsque le continent originel a été partagé en deux par une déchirure lithosphérique (en anglais : rift), qui est en quelque sorte l'embryon d'un océan. À cet endroit, la lithosphère (y compris la croûte continentale) a été étirée et amincie par le début d'écartement des deux plaques, avant d'être complètement brisée par la naissance d'un jeune océan. Les marges passives d'arrachement sont construites sur l'ancien rift, partagé en deux moitiés par l'ouverture océanique. À chaque rift continental correspondent ainsi deux marges « conjuguées », autrefois jointives, maintenant situées de part et d'autre de l'océan, parfois à plusieurs milliers de kilomètres l'une de l'autre.
Ainsi s'expliquent la nature continentale de la croûte sous la marge et son amincissement depuis la côte (de 30 à 35 km d'épaisseur) jusqu'à sa frontière avec le domaine océanique néoformé (de 10 à 7 km d'épaisseur). Ainsi s'explique aussi la structure superficielle de cette croûte, enfouie sous d'épais sédiments, mais où la sismique met en évidence les anciennes failles et les blocs crustaux affaissés et basculés (espacement moyen entre les blocs : 15 km), qui sont des structures d'extension, héritées du rift continental initial. Enfin, cette évolution permet de classer les sédiments accumulés sur les marges d'arrachement en trois grands ensembles, selon qu'ils se sont disposés avant le « rifting » (quand le continent n'était pas encore brisé), pendant l'extension de la croûte (les sédiments s'accumulent alors sur les panneaux de socle effondrés entre des failles actives), enfin après la période d'activité du rift, c'est-à-dire pendant l'ouverture océanique et la création de nouvelle lithosphère à l'axe des dorsales océaniques.[...]
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Écrit par
- Gilbert BOILLOT : professeur à l'université de Paris-VI-Pierre-et-Marie-Curie, directeur du laboratoire de géodynamique sous-marine du Cerov à Villefranche-sur-Mer
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