MARI, site archéologique
Vivre et mourir à Mari
La fondation puis les reconstructions de cette ville vers 2550 et 2250 av. J.-C. exigèrent de gigantesques investissements : située dans un environnement aride, cette ville est l'expression particulièrement aboutie d'une culture fondée sur l'exploitation patiente de ressources limitées et sur une population encadrée par de puissantes institutions centrales, qui lui garantissaient la sécurité militaire, à l'abri de ses puissants remparts, et la sécurité alimentaire, grâce à un réseau de canaux soigneusement entretenus.
Les habitants de Mari
En dehors du monde du palais, nous savons peu de choses des habitants de Mari. Dès 2500 av. J.-C., ils portent des noms sémitiques. Plusieurs dizaines de statuettes, brisées par les soldats d'Akkad en 2300 av. J.-C., représentent des personnalités en prière, membres de la famille royale, fonctionnaires, prêtres et prêtresses. La majorité des statuettes ne portent pas d'inscriptions et sont représentées selon des conventions précises, qui permettent toutefois, par-delà le style, de distinguer des individus. Certaines d'entre elles portent des dédicaces inscrites : le nom et le titre du commanditaire, et le nom de la divinité objet de la dédicace. Certaines statues sont particulièrement célèbres : l'intendant Ebih-iI ou le grand chantre Ur Nanshé de Lagash. Statuettes au sourire caractéristique et vêtues de la robe de laine à longues mèches (dite kaunakès), elles sont l'image d'une élite sociale composée de serviteurs du roi, présentés comme de pieux gestionnaires, telle la statuette d'Ilmeshar, découverte en 2009. Des panneaux de mosaïques de nacre (ville II) qui ornaient des meubles et des coffres nous montrent des scènes de genre codifiées : des femmes occupées à filer la laine, des scènes de sacrifices et des prêtresses en prière, des scènes de banquet et des scènes de victoire avec des défilés de prisonniers nus.
Au-delà de ces scènes conventionnelles, on dispose de peu d'informations sur la population de la ville et sa campagne. Dans la vallée au xviiie siècle av. J.-C., des paysans sédentaires, que l'on nomme Akkadiens, ont cohabité avec des pasteurs semi-nomades, appelés Amorrites, pratiquant avec leurs troupeaux une transhumance entre steppe et vallée. Quant à la population de la ville, elle demeure difficile à estimer et se montait probablement à quelques milliers d'habitants. La surface totale du site n'a jamais été occupée intensivement mais la ville haute, protégée par l'enceinte intérieure, est occupée densément jusqu'à sa destruction finale.
Aux origines de la ville : ville I et ville II
La ville elle-même est organisée selon un système de voirie radioconcentrique, dont les axes principaux rayonnaient depuis le centre monumental vers l'extérieur de la ville. Ces voies principales étaient larges de 4,75 mètres et soigneusement aménagées pour assurer le drainage de l'ensemble de la ville. La gestion des eaux de surface a été un problème constant dans l'histoire de la ville et les Mariotes ont fait usage de systèmes sophistiqués de canalisations pour évacuer les eaux usées ou récupérer les eaux de pluie.
Les architectes qui bâtirent Mari avaient une connaissance approfondie des agents qui menaçaient des maisons bâties en terre : érosion par remontées capillaires des eaux salées de la nappe phréatique, ruissellement et abrasion éolienne. Ils firent usage de plusieurs techniques pour lutter contre ces agents : gravillons et galets pour drainer les eaux usées, bitume et enduits de plâtre étaient utilisés pour assainir les maisons et les grands édifices dotés de puissantes fondations.
Nous connaissons mal les maisons et l'organisation des quartiers urbains. La maison mariote, comme c'est l'usage depuis le Néolithique dans la région,[...]
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Écrit par
- Pascal BUTTERLIN : professeur d'archéologie orientale à l'université de Paris-I-Panthéon-Sorbonne, directeur de la mission archéologique française de Mari (Syrie)
Classification
Médias
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