MARIE D'ORLÉANS, 1813-1939, PRINCESSE ET ARTISTE ROMANTIQUE (exposition)
L'exposition monographique consacrée à Marie d'Orléans, 1813-1839, princesse et artiste romantique, présentée conjointement au musée du Louvre à Paris (18 avril-21 juillet 2008) et au musée Condé à Chantilly (9 avril-21 juillet 2008), ne cherchait pas seulement à ajouter à notre connaissance de la nombreuse famille du roi-citoyen ou à révéler au public une artiste jusque-là connue des seuls spécialistes. Elle s'efforçait surtout d'augmenter d'un chapitre l'histoire – pour une bonne partie encore à faire – de la sculpture en France autour de 1830, et celle des arts décoratifs à la même période, en montrant par l'exemple ce que put être à ce moment-là une certaine sensibilité romantique.
La princesse Marie était le troisième des dix enfants de Louis-Philippe et de sa femme Marie-Amélie. Née en exil en Italie, douée d'une personnalité indépendante et forte, elle bénéficia comme tous ses frères et sœurs d'une éducation soignée, littéraire et historique, mais aussi artistique, avec, notamment, à partir de 1822, des leçons de dessin du peintre Ary Scheffer. Celui-ci allait jouer un rôle éminent en lui permettant d'acquérir les bases du métier de dessinateur, puis de sculpteur, et de prendre conscience de ses dons et de sa vocation d'artiste, ce qui favorisa la naissance d'une véritable amitié entre eux. Ce n'est toutefois qu'après le mariage en 1832 de sa sœur aînée Louise, dont elle était très proche, avec le nouveau roi des Belges Léopold, que Marie d'Orléans se réfugia en quelque sorte dans l'art, et plus précisément dans la sculpture, où pourtant Scheffer, qui fut son guide, n'était pas plus expérimenté qu'elle. Mariée en 1837 au duc Alexandre de Wurtemberg, elle s'établit d'abord avec lui en Allemagne, puis en France, avant de mourir prématurément d'une phtisie à Pise, en 1839. Les deux expositions de Paris et de Chantilly faisaient une large place à ces éléments biographiques, nécessaires à l'appréciation du talent et des réalisations de Marie d'Orléans, grâce à de nombreux tableaux, dessins et souvenirs de famille.
La carrière de sculpteur de Marie d'Orléans fut très courte : cinq ans, dont une partie consacrée à l'apprentissage technique du dessin. Aussi le catalogue de ses œuvres est-il très mince et consiste en quelques portraits, sujets médiévaux et religieux dont se détache l'Ange de la Résignation, et surtout Jeanne d'Arc qui devait rester comme son chef-d'œuvre. Les techniques qu'elle employa étaient celles de son temps. Elles reflètent parfaitement la pratique de la sculpture dans la première moitié du xixe siècle : esquisses, modèles ou tirages en plâtre, généralement de petite ou de moyenne dimension, marbres exécutés par des praticiens (ici Auguste Trouchaud), tirages en bronze. La plupart des œuvres avaient été réservées à la famille et aux proches comme Ary Scheffer (une partie du fonds d'atelier est conservée au musée Scheffer de Dordrecht), ce qui explique à la fois une diffusion assez restreinte et l'existence de collections fournies, comme celle des descendants de l'artiste ou celle du musée Condé, rassemblée par son frère le duc d'Aumale. Fait exception, à la fois par ses dimensions et par la renommée dont elle jouit très vite, la Jeanne d'Arc debout commandée pour le musée historique de Versailles, où elle est toujours. La qualité et la disparition précoce de son auteur jouèrent sans aucun doute leur rôle. Mais il ne faut pas sous-estimer pour autant le sujet même et son traitement, sévère et intime en même temps, qui expliquent aussi sa popularité.
Où classer stylistiquement Marie d'Orléans ? Parmi les romantiques, dont se rapproche sa Jeanne d'Arc pleurant à la vue d'un Anglais blessé[...]
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Écrit par
- Barthélémy JOBERT : ancien élève de l'École normale supérieure, professeur à l'université de Paris-IV-Sorbonne
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