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KASCHNITZ MARIE-LUISE (1901-1974)

À l'écart des groupes et des courants littéraires, ce poète allemand, comblé de prix et de distinctions, est également connu pour ses nouvelles : Ombres allongées (Lange Schatten, 1960), Conversations interurbaines (Ferngespräche, 1966) ; ses essais ; son journal : Des jours, des jours, des années (Tage, Tage, Jahre, 1966). M.-L. Kaschnitz occupe dans la littérature de la République fédérale allemande une place tout à fait originale, même si son œuvre ne compte pas parmi les plus fortes.

Après une adolescence passée à Berlin et à Potsdam, cette fille d'officier, née à Karlsruhe, devient libraire à Weimar, Munich et Rome, où elle fait la connaissance de l'archéologue Guido Kaschnitz-Weinberg qu'elle épouse en 1925. Dès lors, comme tant d'autres poètes allemands, elle partage son existence entre l'Allemagne et l'Italie, entre Francfort et Rome. Elle accompagne son mari dans de nombreux voyages autour du bassin méditerranéen (Grèce, Turquie, Afrique du Nord). Elle y fait provision d'impressions, de couleurs, de méditations aussi sur les mythes et les dieux. On en retrouve la trace et les signes dans la plupart de ses recueils.

Comme Theodor Fontane ou Conrad-Ferdinand Meyer, elle fait partie des créateurs tardifs et ne commence vraiment de publier qu'après 1945. Pourtant, en réaction contre l'esprit rationaliste de son milieu familial, elle manifeste un goût précoce pour la poésie. Elle subit notamment l'influence de Trakl et éprouve une grande attirance pour son univers à cause de ses couleurs et de l'omniprésence de la mort. Elle se dit marquée ensuite par Hölderlin et notamment par ses incantations sur la Grèce et les dieux. Enfin, elle reconnaît sa dette envers Pablo Neruda.

Son œuvre lyrique, dense, compte plus de trois cents poèmes parus en huit recueils : 1° Poèmes (Gedichte, 1947) ; 2° Danse macabre et poèmes actuels (Totentanz und Gedichte zur Zeit, 1947) ; 3° Musique utopique (Zukunftsmusik, 1950) ; 4° Ville éternelle (Ewige Stadt, 1952) ; 5° Cycle de Tutzing (Tutzinger Gedichtkreis, 1952) ; 6° Nouveaux Poèmes (Neue Gedichte, 1957) ; 7° Ton Silence, ma voix (Dein Schweigen, Meine Stimme, 1962) ; 8° Encore un mot (Ein Wort weiter, 1965). Cette œuvre se caractérise par une grande continuité, même si, au niveau des formes, il est possible de noter une évolution. En effet, les poèmes du début, composés de vers classiques, coulés fréquemment dans des formes fixes telles que le sonnet, font place progressivement, surtout à partir de 1960, à de longs cycles en vers libres, tantôt très amples, tantôt très ramassés. Dans ses derniers recueils, sans revenir aux formes fixes, Kaschnitz opte souvent pour des poèmes brefs et denses, en forme de bilan. Sa poésie est une poésie de l'interrogation, de la tension. Sa vibration ne jaillit pas d'un thème particulier, mais d'une aspiration permanente à saisir la vérité, face à l'union indissociable de la vie et de la mort, de l'ombre et de la lumière. Elle naît d'un besoin fébrile de renouer avec Dieu, « L'Invisible », qui a rompu l'« antique dialogue ». Ce n'est pas un hasard si Kaschnitz a consacré à Beckett un essai bref mais pénétrant ou un hymne à cet exilé fondamental qu'était Paul Celan. Ni la nature ni la poésie n'offre un refuge absolument sûr. « Il n'est pas de jardin, si éloigné soit-il / Qui, bientôt, ne soit saccagé par les cris sauvages du monde. » (Un jour.) Le désespoir, pourtant, n'a pas le dernier mot. Certes, nul n'est innocent, mais nul n'est abandonné d'avance. La promesse d'un avenir est à l'œuvre, même si nous ne le percevons pas encore. La mission du poète est de veiller, de garder les yeux ouverts, « d'enregistrer perte après perte » les reculs que le mal universel inflige aux valeurs humanistes. En dépit de ses confessions et[...]

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Écrit par

  • : maître assistant agrégé, docteur de troisième cycle à l'université de Lille-III

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    ...plus recherché que nombre de ces nouveaux écrivains vivent le plus souvent hors des frontières allemandes, ce qui est la reprise d'une tradition. M. L.  Kaschnitz et H. Kesten s'établissent en Italie, P.  Weiss en Suède, H. M. Enzensberger en Norvège. H. Böll partage un moment son existence entre l'Irlande...