LA FAYETTE MARIE-MADELEINE DE dite MADAME DE (1634-1693)
« Mme de La Fayette a eu raison pendant sa vie. Elle a eu raison après sa mort. » Mme de Sévigné croyait-elle si bien dire et comme prophétiser. Depuis trois siècles, en effet, ce nom a fait éclore un mythe. Qu'importe qu'elle soit auteur plus qu'écrivain si sa postérité littéraire en est encore à s'enrichir de cette sorte de cascade qui (hommage, influence, tentative concertée), en ordre ou dans le désordre, en passant par Constant, Stendhal ou Gobineau, Fromentin ou Radiguet, a nourri l'art du roman.
Est-ce une langueur mélancolique qui la fit surnommer « le brouillard » par les familiers de l'hôtel de Nevers, tandis que d'aucuns vantaient sa « divine raison » ? Nul doute qu'elle ait eu son mystère, cette grande dame française, un peu fragile, qui se disant « baignée de paresse » n'en menait pas moins ses affaires avec ardeur, qui, prude, dévote, jeune et non veuve, laissa La Rochefoucauld ne la presque pas quitter, qui, ne détestant pas l'intrigue, ne s'aliéna nulle amitié, et, sensible aux succès mondains, empêcha, néanmoins, qu'aucune de ses œuvres fût publiée sous son nom.
L'intelligence du succès
L'époque était de celles où une fortune trop petite, une érudition trop grande et une noblesse médiocre gênaient l'établissement d'une fille. Or, tout homme de goût qu'il fût, son père, Marc Pioche de La Vergne, n'était que simple écuyer. Sans doute Marie-Madeleine, qui naquit à Paris, eût-elle passé son existence parmi nombre d'honnêtes gens plus cultivés que courtisans, si sa mère, Isabelle Pena, n'eût été assez habile pour la pousser dans le monde. Elle lui donne pour parrain Urbain de Maillé, marquis, maréchal de France et beau-frère de Richelieu ; pour marraine, Marie-Madeleine de Vignerol du Plessis, nièce du même Richelieu et future duchesse d'Aiguillon. Retz, le coadjuteur, fréquente la maison, ainsi que Renaud de Sévigné (oncle de la marquise) qu'Isabelle Pena épousera en secondes noces. Les activités frondeuses de ce beau-père turbulent, et qui lui vaudront peut-être son goût pour la politique, n'empêcheront pas Marie-Madeleine d'être, en 1651, demoiselle d'honneur de la reine, et, en 1654, de se lier avec Henriette d'Angleterre, dont elle écrira une vie, et qui séjourne en le couvent de Chaillot. En 1655, elle épousera le frère de la supérieure de ce couvent, Jean François de La Fayette, de vingt ans son aîné ; mais un nom, et certaine fortune.
De « cette chose incommode » que lui paraît être l'amour, elle ne souffrira guère. Laissant en ses terres d'Auvergne un mari fort peu gênant, Mme de La Fayette ne quittera plus Paris jusqu'à sa mort. Le mariage d'Henriette d'Angleterre avec Monsieur, duc d'Orléans, lui ouvrira les portes de la Cour. Son sens pratique et son esprit feront le reste : elle saura mener la carrière de ses fils et devenir « une personne considérable ».
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Écrit par
- Jeanne FAURE-COUSIN : écrivain
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