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MARINE

Les marines à voile des grands États européens modernes (XVIe-XIXe s.)

Il ne faut pas exagérer, dans l'Europe de la Renaissance, le déclin des marines méditerranéennes. Venise, sous l'impulsion d'un Cristoforo Da Canal, chercha à adapter sa flotte de galères à la défense de ce qui lui restait d'empire contre une piraterie croissante et un nouvel ennemi, la flotte turque. À partir des guerres d'Italie, les marines atlantiques franchirent en force le détroit de Gibraltar, si bien que la bataille de Lépante (1571) fut un affrontement collectif – le dernier – de la Chrétienté et de l'Islam. En fait, les acteurs étaient maintenant les principaux États européens, dont les rivalités s'étendaient à toutes les mers.

Durant la période allant du xvie siècle au milieu du xixe, l'initiative appartint à l'Occident et l'histoire navale suivit le cours des transformations politiques et des progrès techniques de celui-ci. Une certaine coïncidence historique fait correspondre la grande époque du voilier avec le développement des puissances maritimes européennes. En conséquence, à des missions nouvelles les marines durent adapter des moyens nouveaux.

Un premier trait, commun à tous les États, fut la possession permanente de flottes de guerre. Un second, résultant de l'extension aux nouveaux mondes de la domination politique de l'Espagne et du Portugal d'abord, de la France, de l'Angleterre et des Provinces-Unies ensuite, fut l'allongement des lignes de communication sur lesquelles devaient s'exercer les actions de surveillance, de défense ou d'attaque. D'autre part, à la faveur de possibilités techniques nouvelles, les marines recherchèrent la mobilité et la puissance de feu. La première fut acquise grâce aux progrès constants de la construction navale et à la démultiplication du gréement, favorables à l'allongement du rayon d'action des marines. Il y eut désormais des types caractérisés de navires de guerre ; le premier bien défini fut, sans doute, le galion, et les plus évolués furent ceux de l'« ère des grands voiliers » (vaisseau, frégate, corvette, flûte), dont la variété correspondait à la diversité des services rendus. La puissance de feu s'évalua en nombre de canons, eux-mêmes de plus en plus puissants ; mais on doit se souvenir de l'invention décisive, vers 1500, des sabords, grâce à quoi l'artillerie embarquée, stabilisée, put être mieux exploitée et multipliée. Dans tous les pays, également, la possession d'une marine permanente n'empêchait pas de recourir, en temps de guerre, aux services des navires marchands équipés pour le combat, soit par suite d'une réquisition, soit en vertu d'un contrat : l'armement en course se distingua ainsi par un caractère juridique précis de la piraterie pure et simple, condamnée à la fois par le droit maritime et le droit des gens, formulés de façon plus précise.

En fin de compte, la recherche de la puissance maritime conduisit les gouvernements à concevoir, sinon à suivre, une politique et une stratégie navales. On constate donc qu'à l'intérieur d'une longue période de trois siècles et demi, marquée par toute une série de progrès techniques, les grandes phases de l'évolution de l'histoire des marines correspondent au développement de l'État dans les divers royaumes et à leurs rivalités politiques et économiques. En France et en Angleterre, une prise de conscience s'est manifestée par une contestation réciproque pour la prééminence sur mer (Débat des hérauts d'armes de France et d'Angleterre) ; mais l'Angleterre, libérée de ses ambitions continentales par sa défaite de la guerre de Cent Ans, pouvait prétendre à une vocation maritime sans partage.

Au xvie siècle, les deux pays voulurent défendre[...]

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