MARITIMISATION DE L'ÉCONOMIE
Depuis l’Antiquité, la voie maritime a permis aux navigateurs de commercer en transportant dans leurs navires des quantités de marchandises très supérieures à celles que permettaient les voies terrestres – ainsi, les Égyptiens, qui allaient jusqu’à Sumatra quelque 1200 ans avant notre ère ou, plus près de nous, les Phéniciens en Méditerranée, ou encore les marchands des villes de la Hanse en Europe du Nord. Les plus anciens ports du monde, comme celui de Lothal, appartenant à la civilisation de l’Indus et qui remonterait à 2200 ans avant notre ère, témoignent de l’ancienneté et de l’universalité de ces échanges.
Le commerce international s’est particulièrement développé à partir de la Renaissance et des grandes découvertes au xvie siècle, puis s’est progressivement mondialisé à partir du xixe, pour connaître, après les deux conflits mondiaux du xxe, un nouvel essor à partir des années 1970, notamment grâce au développement de la conteneurisation, puis à l’émergence de la Chine comme « atelier du monde ». Le transport maritime est ainsi devenu un puissant vecteur de l’économie mondiale, si bien qu’on peut parler de maritimisation de l’économie dans la mesure où la logistique maritime participe à environ 90 % des échanges mondiaux en tonnage et à 80 % en valeur.
Par ailleurs, la maritimisation de l’économie déborde largement le seul secteur du transport maritime et des ports puisqu’elle concerne aussi l’énergie – avec le développement considérable de l’éolien en mer – et les transmissions numériques – avec l’essor des câbles optiques sous-marins.
Croissance rapide des transports maritimes internationaux
Une croissance différente selon le type de marchandises
La croissance des flux maritimes de marchandises est considérable depuis les années 1970, variant selon la nature des marchandises transportées et l’orientation géographique. Classiquement, on distingue le vrac – les marchandises non conditionnées, liquides ou solides, dont une grande partie est destinée aux approvisionnements industriels – des marchandises diverses, conteneurisées ou non, qui sont pour la plupart des produits manufacturés. Si la conteneurisation permet de transporter une très grande variété de ces produits, voire la plupart, les automobiles sont acheminées par des navires dits rouliers, faciles à charger ou à décharger, et certains colis particulièrement lourds ou volumineux par des cargos aux ponts adaptés.
Entre 1970 et 2019, le transport des vracs liquides (produits énergétiques pétroliers ou gaziers, produits chimiques…) a été multiplié par 2,2 en tonnage. Celui des cinq grands vracs, que la Conférence des Nations unies pour le commerce et le développement (CNUCED) regroupait au sein d’une même catégorie jusqu’en 2006 dans ses statistiques annuelles du transport maritime mondial – minerai de fer, céréales, charbon, manganèse et phosphate (les flux de ces deux derniers sont désormais comptabilisés avec les matières sèches) – a septuplé, ce qui correspond pour beaucoup au développement de la sidérurgie en Chine et aux croissances des exportations de céréales du Brésil, de l’Amérique du Nord, de l’Europe, ainsi que de la Russie et de l’Ukraine. Le transport des autres marchandises (principalement les conteneurs et les trafics rouliers) a lui aussi quasiment septuplé.
Sur la période 1980-2019, pendant laquelle la population a augmenté d’environ 70 %, le trafic maritime a triplé – à peu près comme le PIB mondial – et le trafic conteneurisé a été multiplié par quinze. La standardisation et le perfectionnement des conteneurs ont introduit une véritable rupture dans le transport de marchandises.
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Écrit par
- Geoffroy CAUDE : ingénieur général des ponts, des eaux et des forêts, membre associé de l'Inspection générale de l'environnement et du développement durable
Classification
Médias