MARKET AND HIERARCHIES. ANALYSIS AND ANTITRUST IMPLICATIONS, Oliver E. Williamson Fiche de lecture
Lorsqu'il publie, en 1975, son premier ouvrage, Market and Hierarchies, Oliver Williamson (né en 1932) a déjà un riche parcours. Après des études d'ingénieur au M.I.T., il s'est orienté vers la gestion, d'abord à Stanford auprès de Kenneth Arrow, puis à Carnegie-Mellon auprès d'Herbert Simon pour étudier le comportement managérial dans la firme. Un passage à la division antitrust du Département de la Justice américain précède sa carrière universitaire. Market and Hierarchies (1975) marque une véritable rupture analytique avec l'approche microéconomique standard du rôle des firmes dans une économie de marché. Dès la préface, le lecteur est invité à penser en termes de coûts de transaction (« think transactionally ») : l'unité élémentaire d'analyse est la transaction et non plus les prix et les quantités ; la réflexion porte sur l'organisation économique efficace des transactions, et la solution n'est pas forcément le marché, ni même une situation d'équilibre. L'apport de Williamson, dans cet ouvrage fondateur de l'économie néo-institutionnelle, est à la fois théorique et empirique.
Le développement de l'approche en termes de coûts de transaction
Au plan théorique, Williamson s'applique à rendre opérationnel le concept de coût de transaction, introduit par Coase dans son article The Nature of the Firm de 1937. Pour cela, il élabore le cadre d'analyse des défaillances organisationnelles (Organizational Failures Framework), aujourd'hui reconnu comme celui de la théorie des coûts de transaction.
Comme Coase, Williamson considère l'organisation hiérarchique qui caractérise la firme comme une alternative au marché pour réaliser des transactions, au sens où elle permet, dans certaines circonstances, d'économiser sur les coûts de recours au marché. Pour autant, de la même manière qu'il existe des défaillances de marché (market failures), il existe des coûts spécifiques de l'organisation hiérarchique qui sont à l'origine des défaillances organisationnelles (organizational failures).
Le cadre d'analyse de la théorie des coûts de transaction propose un mode de traitement systématique des transactions qui permet d'identifier, pour une transaction donnée, les coûts de transaction associés à des formes d'organisation alternatives. Les coûts de transaction sont ceux liés aux transferts de droits entre agents et notamment à la négociation, à l'écriture et à la mise en œuvre des contrats (c'est-à-dire des accords formels ou informels passés entre les agents pour la réalisation d'une transaction). Deux types de facteurs générateurs de coûts sont identifiés. Tout d'abord, des facteurs humains : la rationalité limitée, initialement introduite par Herbert Simon en 1961, et la tendance à l'opportunisme des individus qui privilégient leur intérêt personnel, en utilisant au besoin et de façon consciente la tricherie et la ruse, assez loin de la rationalité parfaite et de la poursuite vertueuse de l'intérêt personnel telles que les supposent les modèles néo-classiques. Ensuite, des facteurs environnementaux ou exogènes : l'incertitude et la complexité, la présence d'un petit nombre d'offreurs d'actifs spécifiques, l'asymétrie d'information. La combinaison et le degré d'acuité de ces facteurs expliquent l'importance des coûts de transaction. Williamson repère les circonstances dans lesquelles l'organisation hiérarchique permet de les réduire et celles dans lesquelles il est préférable de s'en remettre au marché. Dans ses ouvrages ultérieurs (The Economic Institutions of Capitalism (1985) et The Mechanisms of Governance (1996)), Williamson étendra son cadre d'analyse aux structures de gouvernance intermédiaires entre les organisations[...]
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Écrit par
- Carine STAROPOLI : maître de conférences à l'université Paris-I
Classification
Média