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MARSEILLE ANTIQUE

Cité des origines et fouilles récentes

Sans contredire la tradition littéraire, les fouilles des années 1980 invitent à distinguer dans l'histoire des premiers temps de Marseille trois grands moments. La présence grecque remonte à la fin du viie siècle avant notre ère – ce qui confirme la datation donnée par les textes pour la fondation de Massalia : en 600 ou vers 600. Les importations de céramique forment dès le début des séries cohérentes et continues. Cela tend à prouver que la colonie phocéenne a débuté brusquement. Elle s'est en outre installée sur un site vierge, dont seul auparavant le rivage avait été fréquenté. Les Phocéens se sont établis, les premiers, à l'entrée du Vieux Port, sur le promontoire occupé aujourd'hui par le fort Saint-Jean et dans ses environs immédiats. Près de l'église Saint-Laurent, sur la colline du même nom, quelques traces de l'habitat grec offrent le plus ancien exemple d'architecture domestique, vers 590 avant notre ère. On y a ainsi découvert un pot modelé indigène, avec un couvercle en céramique à pâte claire fabriqué au tour selon une technique grecque. Cette association de techniques témoigne d'une cohabitation pacifique entre les nouveaux venus et leurs voisins ligures.

Cette période de démarrage s'arrête un quart de siècle plus tard. Une phase étrusque – un moment où les apports d'Étrurie sont plus conséquents que les importations grecques – lui succède jusqu'en 550. Une troisième phase commence alors. Marseille n'est plus un emporion, une place de commerce ouverte à différentes influences et aux marins de toute la Méditerranée. Elle est devenue une cité prospère contrôlant un territoire et produisant un vin réputé.

Dès le deuxième quart du vie siècle, la ville s'est développée vers le nord et à l'est, le long du Vieux Port, jusqu'aux docks romains. Les pentes de la butte Saint-Laurent reçoivent un habitat en terrasses. Au troisième quart du même siècle, une production d'amphores a commencé, comme en témoignent les restes de fours de potiers sous l'ancienne rue Négrel, au pied de l'hôtel-Dieu. De 520 à 480, la ville continue son expansion vers l'est ; elle se développe le long du rivage jusqu'à atteindre le site de l'actuel Jardin des vestiges, dans le secteur de la Bourse. La corne du port – dont les aménagements aujourd'hui visibles sont d'époque romaine et qui n'était à l'origine qu'une anse peu profonde – et ses marécages forment une frontière naturelle. On la renforce d'une muraille en calcaire blanc couronnée de briques ; elle ne comprend sans doute pas encore la butte des Carmes. Au nord, les constructions gagnent peu à peu vers le quartier du Panier.

Le port archaïque se trouvait à l'est des premières habitations grecques. L'exploration archéologique de la place Jules-Verne, toute proche de la mairie, a révélé un témoin unique de l'architecture portuaire grecque : les structures d'un quai, conservé sur une dizaine de mètres, qui date du premier quart du vie siècle. Parmi plusieurs épaves, on a retrouvé celles de deux navires coulés vers 500 avant notre ère. Ils ont dû être fabriqués deux ou trois générations seulement après la fondation de Marseille. Outre sa datation, c'est le mode de construction de la plus petite des embarcations qui retient l'attention : la fixation des bordés a été effectuée en partie selon une technique d'assemblage par ligatures. Bien qu'attestée par des textes antiques, la mise en œuvre de ce procédé était jusqu'à présent mal connue ; elle s'éclaire grâce à ces vestiges remarquables.

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Écrit par

  • : professeur émérite d'histoire ancienne, université de Bourgogne, Dijon

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Marseille antique - crédits : Encyclopædia Universalis France

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