Abonnez-vous à Universalis pour 1 euro

PAN MARTA (1923-2008)

Artiste de renommée internationale, Marta Pan incarne une ligne exigeante au sein de la sculpture moderne dans son lien à la nature comme à la cité, dans son ambition monumentale et architecturale. À partir de recherches techniques poussées, elle a su inventer une poétique personnelle dans un dépouillement formel qui confine à l'austérité. Présentes dans de nombreux sites publics en Europe comme au Japon, ses sculptures habitent avec une audace singulière l'espace qu'elles recréent autour d'elles et portent la marque d'un itinéraire qui a commencé dans le Paris de l'après-guerre.

Née à Budapest en 1923, Marta Pan arrive à Paris en 1947 après une formation classique à l'École des beaux-arts de Budapest. Elle a la chance de rencontrer Brancusi, Fernand Léger et Le Corbusier et réalise très rapidement ses premières sculptures connues, résolument abstraites : Sculpture 3 (1947). En 1952, elle épouse l'architecte André Wogenscky – ils construisent ensemble leur demeure de Saint-Rémy-lès-Chevreuse, en région parisienne, inscrite en 1997 à l'Inventaire supplémentaire des monuments historiques – puis invente ses premières créations vraiment personnelles – Charnière (1952), Le Teck (1956). Cette dernière œuvre inspire à Maurice Béjart un ballet du même nom, sur une musique de Jerry Mulligan, présenté au Festival de l'avant-garde de Marseille en 1956. Cette collaboration se poursuit avec Équilibre (1958-1959), chorégraphie où s'unissent d'une manière nouvelle la sculpture et la danse : c'est la sculpture même inventée par Marta Pan qui suggère le thème et l'organisation d'ensemble du ballet, fondé sur l'unité en mouvement de l'œuvre et de la danseuse qui s'y insère, en un équilibre aussi fragile que dynamique.

En 1961, A. M. Hammacher commande à M. Pan une sculpture pour le parc du Musée Kröller-Müller (Otterlo, Pays-Bas). Il s'agit de Sculpture flottante 1, sa première œuvre monumentale. Elle propose une œuvre flottante et mobile, placée sur un étang qu'elle redessine pour cette occasion. Prouesse technique réalisée en polyester par Saint-Gobain, cette sculpture est la première d'une série d'une vingtaine de créations flottantes à laquelle appartient Trois Îles, installée à Luxembourg en 2000. En dialogue privilégié avec leur site, ces œuvres s'animent de manière imprévisible selon les caprices de l'eau et des vents qui les font sans cesse évoluer. Mais tout mouvement violent est soigneusement rendu impossible, de manière à préserver la lenteur et la majesté du déplacement.

Le souci d'intégration au site se marque aussi dans une relation privilégiée à l'architecture, qui commence notamment avec un ensemble mobile, Sculpture en quatre éléments, installé en 1964 dans le hall d'entrée de la faculté de médecine Saint-Antoine (Paris XIIe, architecte Wogenscky) puis se poursuit avec d'autres architectes : Jean Dubuisson, pour les sculptures-poignées du musée des Arts et Traditions populaires (Paris XVIe, 1972) ou Kenzo Tange, pour le Fragment de paysage, du nouvel hôtel de ville de Tōkyō (1991). Marta Pan crée des formes en contrepoint de l'architecture, qui redéfinissent à leur manière le lieu où elles trouvent place. À une échelle plus grande, la sculpture touche aussi à l'urbanisme, au remodelage sensible de l'espace de la cité, ainsi qu'en témoigne la rue de Siam à Brest (1986), projet de recréation d'un lien continu entre le cœur de la ville et l'océan, demeuré, hélas, définitivement inachevé. La première phase, avec les Sources et la Place des lacs, révèle un paysage urbain d'une réelle qualité, qui redonne au centre-ville un rythme et une physionomie singulières. Même dans des réalisations de taille plus modeste – [...]

La suite de cet article est accessible aux abonnés

  • Des contenus variés, complets et fiables
  • Accessible sur tous les écrans
  • Pas de publicité

Découvrez nos offres

Déjà abonné ? Se connecter

Écrit par

  • : professeur d'histoire et de théorie de l'art contemporain, université de Paris VIII

Classification

Autres références

  • WOGENSCKY ANDRÉ (1916-2004)

    • Écrit par
    • 971 mots

    Proche de Le Corbusier, dont il fut, pendant vingt ans, le collaborateur, André Wogenscky a su créer une œuvre personnelle, qui constitue une contribution originale à l'architecture du xxe siècle. Né à Remiremont (Vosges), il est admis à l'École des beaux-arts de Paris en 1934,...