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BUBER MARTIN (1878-1965)

Conscience d'Israël

Participant depuis sa fondation en 1925 au Brit Shalom, organisation qui prônait l'établissement d'un état binational, il n'aura de cesse de tenter un impossible dialogue avec les arabes ainsi que l'indique le superbe florilège Une terre et deux peuples édité par Paul Mendes- Flohr, l'un de ses meilleurs exégètes.

Il publie de plus en plus en hébreu, intervient dans la presse et reste à Jérusalem durant toute la guerre dite « de libération », le siège puis la déclaration de l'État d'Israël. Engagé activement depuis toujours dans la formation pour adultes, et plus généralement dans la réflexion sur l'éducation permanente, il fonde une école d'enseignement des maîtres, très importante pour un petit pays en guerre qui accueillera plusieurs centaines de milliers de juifs, rescapés de la Shoah et/ou renvoyés des pays arabes.

Enfin, il est l'homme de la réconciliation avec les chrétiens et les Allemands. Il se rend à Francfort pour recevoir le prix de la paix en 1953, ce qui provoque un tollé en Israël. Son premier voyage en Allemagne date de 1951. Dans son ouvrage Deux Types de foi, il fixe sa conception des relations entre le judaïsme et le christianisme et dans Éclipse de Dieu, il critique Sartre et Heidegger.

Deux séjours aux États-Unis, où il est très connu, achèveront de lui donner une notoriété mondiale. Il termine sa traduction de la Bible en 1961. Autant lu par les psychologues et les psychanalystes que par les philosophes et les historiens des religions, il meurt le 13 juin 1965 devenu non seulement une sorte de conscience d'Israël, mais encore un des grands représentants de l'humanisme juif. Véritable icône croulant sous les distinctions, il a pourtant, même comme président de l'Académie israélienne des sciences et des humanités, régulièrement pris parti dans les grandes affaires de son temps, en faveur des juifs d'U.R.S.S. avec Russell et Mauriac ou à propos du procès Eichmann.

Son œuvre est aujourd'hui traduite dans une dizaine de langues et il fait l'objet de nombreuses études même en Israël où il fut longtemps absent du débat intellectuel. L'importance de la réflexion éthique et le regain de l'histoire des religions, tout comme les incertitudes politiques au Moyen-Orient et le désarroi global du monde rendent sa pensée très actuelle.

— Dominique BOUREL

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  • : docteur ès lettres, université de Paris-IV, directeur de recherche au C.N.R.S.

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