BARCOS MARTIN DE (1600-1678)
Neveu de l'illustre abbé de Saint-Cyran, comme lui originaire de Bayonne. Élève de Jansénius à l'université de Louvain, il sera réputé pour l'étendue de sa science théologique. Son oncle le place comme précepteur auprès des enfants d'Arnauld d'Andilly, puis, en 1629, le prend à ses côtés comme secrétaire. Il lui donne sans doute part à la rédaction de ses œuvres, notamment du Petrus Aurelius. Mais il est clair qu'il ne se fie pas assez à lui pour en faire son successeur, soit dans les luttes théologiques, soit dans la direction de conscience. Pourtant, à la mort de son oncle (1643), Barcos devient à son tour abbé de Saint-Cyran et garde beaucoup du prestige attaché à ce nom, surtout auprès des purs spirituels de Port-Royal, la Mère Angélique, Singlin. Au contraire, avec Arnauld, une certaine tension se fait jour dès 1644, lorsque Barcos attire la foudre sur La Fréquente Communion pour avoir soutenu dans la préface que saint Pierre et saint Paul sont les deux chefs de l'Église qui n'en font qu'un, proposition qu'il s'obstine à défendre en plusieurs ouvrages.
Retiré après 1650 dans la solitude de son abbaye, il professe le refus du monde, prompt à dénoncer l'orgueil et l'ambition en toute activité humaine, viserait-elle au bien de l'Église. Il porte à l'extrême la méfiance à l'égard du raisonnement en théologie, s'en tenant strictement à l'autorité de l'Écriture et des Pères (voir son Exposition de la foi catholique touchant la grâce et la prédestination, publiée en 1696), et tient à chasser tout élément discursif de la prière, dont il fait le fruit spontané de l'action de Dieu en l'âme (voir Les Sentiments de l'abbé Philérème sur l'oraison mentale, publiés en 1696) : il s'attire sur ce sujet de vives critiques de la part de son principal adversaire, Nicole. Il condamne la polémique et l'apologétique, préconisant le silence. Ainsi se comprend son attitude lors de l'affaire du Formulaire : si opposé qu'il soit à la condamnation de Jansénius, il admet que les religieuses puissent signer par pure obéissance. Ces vues à la fois extrêmes et paradoxales, traditionnellement interprétées comme la marque d'un esprit chagrin, et peut-être faux, sont-elles hautement significatives ? Caractérisent-elles une sorte de jansénisme extrémiste ? C'est le point de vue de Lucien Goldmann, qui a édité (incomplètement) sa Correspondance (1956). Mais n'est-ce pas faire trop d'honneur à un esprit dont la hardiesse n'est pas nécessairement profondeur ?
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Écrit par
- Jean MESNARD : agrégé de l'Université, docteur ès lettres, professeur de littérature française à l'université de Paris-IV-Sorbonne
Classification
Autres références
-
JANSÉNISME
- Écrit par Louis COGNET , Jean DELUMEAU et Maurice VAUSSARD
- 4 133 mots
- 2 médias
...publication en 1696 de l'Exposition de la foi catholique touchant la grâce et la prédestination qu'avait autrefois rédigée un extrémiste augustinien, Martin de Barcos (1600-1678), neveu de Saint-Cyran, et aussi la diffusion, en 1702, du Cas de conscience posé à la Sorbonne par un curé d'Auvergne : peut-on...