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PARR MARTIN (1952- )

Né en 1952 à Epsom dans le Surrey (Grande-Bretagne), Martin Parr est élevé dans la grande banlieue de Londres au sein d'une famille méthodiste appartenant à la middle class. Il contracte très tôt le virus de l'observation auprès d'un père passionné d'ornithologie, et celui de la photographie grâce à un grand-père adepte des photo-clubs. Durant ses études de photographie à Manchester Polytechnic (1970-1973), il réalise un jeu de société (Love cubes, 1972), une installation (Home Sweet Home, 1973) et une série d'images (June Street, 1972) dans laquelle il photographie systématiquement et frontalement les familles d'une rue anglaise typique. Installé à Hebden Bridge dans le Yorkshire, puis à Wallasey près de Liverpool, il continue à s'intéresser au mode de vie des classes populaires dans cette Angleterre du Nord frappée par le déclin industriel. Il consacre aussi une série au mauvais temps britannique (Bad Weather, 1982), et à l'Irlande profonde (A Fair Day, 1980-1983).

C'est dans les années 1980, avec le recours à la couleur, que s'affirme le style acidulé et ironique de Martin Parr. Avec humour, mais sans concession, ses tableaux aux couleurs criardes traquent alors les comportements stéréotypés de ses concitoyens (The Cost of Living, 1988-1989), le ridicule du tourisme de masse (The Last Resort, 1983-1986 ; Small World, 1987-1994), le consumérisme débridé (One Day Trip, 1988), l'ennui des couples (Bored Couples, 1991), le kitsch des intérieurs anglais (Signs of the times, 1992), la « mal-bouffe » (British Food, 1995-1996), la vulgarité des gaspillages en tous genres (Common Sense, 1995-1999), l'obsession du téléphone portable (Phone Book, 2005), les vanités de la mode (Fashion Magazine, 2005)... Jugés cruels par ses détracteurs, ses gros plans isolent un touriste rubicond, une bouche engouffrant un hot-dog, des pantoufles acryliques fluo, un caddie bourré... Depuis les années 1990, Martin Parr pointe aussi son objectif décapant sur le monde globalisé : des Russes découvrant un Mac Do (1991), le kitsch de la Corée du Nord (1996), des Japonais endormis dans le métro (1998)...

Associant les sujets de prédilection du documentaire social à la démarche des artistes conceptuels, l'efficacité des codes visuels de la pub à l'esthétique kitsch de la photographie vernaculaire, Martin Parr produit des séries cohérentes qui constituent un témoignage original et précieux sur ses contemporains. De la mode à la publicité, du reportage au film documentaire (It's Nice Up North, 2006), très sollicité par les directeurs artistiques de la publicité et des magazines, Martin Parr navigue sans problème d'un monde à l'autre. Un éclectisme qui fait grincer les dents les tenants du photoreportage traditionnel comme Henri Cartier-Bresson, et qui produit un électrochoc à l'agence Magnum où il entre en 1994. Influencé par les Américains Diane Arbus et William Eggleston, Martin Parr partage aussi avec Bill Owens ce souci d'enregistrer les faits et gestes de la classe moyenne de son pays, soulignant la crise spirituelle qui la frappe.

Outre les nombreux livres et expositions consacrés à son œuvre un peu partout dans le monde, Martin Parr a été directeur artistique des Rencontres internationales de la photographie d'Arles en 2004. Collectionneur et bibliophile boulimique, il a aussi publié Boring Postcard (1999), Autoportraits (2000) et Le Livre de photographies : une histoire (2006-2007). En 2002, une rétrospective au Barbican de Londres et une monographie due à Val Williams ont permis d'éclairer la portée esthétique et sociologique de cette œuvre iconoclaste.

— Armelle CANITROT

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