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MARTINIQUE

L’expérience de la départementalisation

Pendant la Seconde Guerre mondiale, sous le commandement de l’amiral Georges Robert, nommé haut-commissaire en 1939, la situation de l’île devient critique. En effet, la Martinique constitue un enjeu stratégique dans le conflit, dans la mesure où une partie des forces navales françaises se sont réfugiées dans la baie de Fort-de-France et où les réserves d’or de la Banque de France ont été mises à l’abri dans la ville. Les autorités, ralliées à Vichy, sont surveillées de près par les Anglais et les Américains. La vie économique est pratiquement paralysée jusqu’en 1945 et la population souffre de graves pénuries. En juillet 1943, l’ambassadeur Henri Hoppenot vient réaffirmer – au nom du Comité français de libération nationale, basé à Alger – l’appartenance de l’île à la République. En mars 1946, la loi de départementalisation des anciennes colonies d’Amérique est votée à l’unanimité, à l’initiative des députés d’outre-mer, dont Aimé Césaire, écrivain et poète, originaire de la commune de Basse-Pointe. Malgré les privations et les difficultés de liaison, la Martinique marque clairement sa volonté de rester française.

Fort-de-France : la bibliothèque Schœlcher - crédits : P. A. Thompson/ The Image Bank Unreleased/ Getty Images

Fort-de-France : la bibliothèque Schœlcher

La vie politique, pendant la IVe et le début de la Ve République, est dominée par la personnalité de Césaire, député de la Martinique jusqu’en 1993 et maire de Fort-de-France jusqu’en 2001. En 1956, Césaire se sépare du Parti communiste français (PCF) et, deux ans plus tard, fonde le Parti progressiste martiniquais (PPM) qui, s’appuyant sur la gestion municipale de Fort-de-France, obtient de beaux succès électoraux. Césaire rejette « l’assimilation », qui nie la spécificité antillaise, mais se tient soigneusement à l’écart des groupes minoritaires qui réclament, dès les années 1960, l’indépendance de l’île.

À la fin du xxe siècle, le débat politique est transposé sur le plan culturel avec la revendication forte de « créolité martiniquaise ». Un nouveau parti, qui reprend cette rhétorique identitaire, émerge en 1978 : le Mouvement indépendantiste martiniquais (MIM) est fondé par Alfred Marie-Jeanne, maire de la commune de Rivière-Pilote. À la tête du conseil régional de 1998 à 2010, Marie-Jeanne accompagne l’évolution statutaire des institutions dans l’île dans le sens de la décentralisation. En février-mars 2009, la Martinique est affectée par un puissant mouvement social, démarré en Guadeloupe, et marqué par des revendications syndicales et des grèves qui paralysent toute l’activité.

À la suite de deux référendums tenus en janvier 2010, les Martiniquais approuvent la création d’une collectivité unique dans le cadre de l’article 73 de la Constitution. Le nouveau statut de la collectivité territoriale de Martinique (CTM), promulgué le 27 juillet 2011, permet le regroupement des compétences exercées par les anciens conseils (conseil général et conseil régional) et offre une meilleure reconnaissance de la part de la métropole française, de l’Union européenne – vis-à-vis de laquelle la Martinique bénéficie du statut de région ultrapériphérique (RUP) – et des autres territoires de la Caraïbe. Ainsi, la Martinique est membre associé de l’Association des États de la Caraïbe (AEC) et de l’Organisation des États de la Caraïbe orientale (OECS en anglais). À côté de l’Assemblée de Martinique qui délibère et d’un conseil économique et social consultatif, le conseil exécutif dirige l’action de la collectivité pendant un mandat de six ans. Mais la légitimité des institutions est affaiblie, tant aux élections nationales que locales, par une abstention habituellement très forte.

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