TALVELA MARTTI (1935-1989)
Au sein de la pépinière de grands chanteurs wagnériens que constitue la Scandinavie, la Finlande s'est plutôt illustrée dans le domaine des voix masculines. La basse Martti Talvela fut l'une des figures de proue de cette école.
Né à Hiitola (Carélie orientale), le 4 février 1935, dans une famille de dix enfants dont il était le huitième, il s'intéresse d'abord à la boxe. Il commence ses études musicales à l'Académie de musique de Lahti avec Taunokaivela à partir de 1958 et les poursuit à Stockholm avec Carl Martin Öhmann. Il débute à l'Opéra royal de cette même ville en 1961 dans Rigoletto (Sparafucile). Wieland Wagner l'y remarque et l'engage aussitôt pour chanter à Bayreuth, où il sera l'un des piliers du festival entre 1962 et 1970, incarnant tour à tour Titurel (Parsifal, 1962, 1964 et 1965), le Landgrave (Tannhäuser, 1964-1966), Hunding (La Walkyrie, 1965-1967), Fasolt (L'Or du Rhin, 1965-1967), le roi Marke (Tristan et Isolde, 1966-1970), Daland (Le Vaisseau fantôme, 1969 et 1970). À partir de 1962, il appartient à la troupe de la Deutsche Oper de Berlin. Il fait ses débuts à la Scala de Milan en 1963 et chante pour la première fois en France à Bordeaux en 1965 (le roi Heinrich de Lohengrin). Karajan l'engage à Salzbourg pour le festival de Pâques en 1967 (Hunding, Fasolt). L'année 1968 voit ses débuts au festival d'été (le Commandeur de Don Giovanni), où il revient chanter Sarastro (La Flûte enchantée) entre 1978 et 1984. En 1968 également, il débute au Metropolitan Opera de New York (le Grand Inquisiteur dans Don Carlos) ; il deviendra l'un des habitués de cette scène, où il participera à plus d'une centaine de représentations en vingt ans (Hunding, Fasolt, Gremin, Osmin, Gurnemanz, Sarastro...). En 1969, il chante Daland à l'Opéra de Chicago. En 1970, il fait ses débuts à Covent Garden dans La Tétralogie, en 1974 à l'Opéra de Paris dans Parsifal (Gurnemanz). La même année, au « Met », il est l'un des premiers chanteurs à présenter Boris dans la version originale de Moussorgski, personnage qu'il marquera d'une empreinte indélébile et qu'il incarnera sur les plus grandes scènes du monde. Il chante aussi à l'Opéra de Vienne et en U.R.S.S. (Philippe II[Don Carlos]et Boris au Bolchoï et au Kirov en 1977). Malgré une carrière internationale très prenante, il participe à la vie musicale de son pays, dirigeant notamment, entre 1972 et 1980 le festival d'été de Savonlinna. En 1973, il reçoit le prix Pro Finlandia décerné par le gouvernement finlandais. En 1975, il cree à Helsinki l'opéra de Joonas KokkonenViimeiset Kiusaukset (Les Dernières Tentations, rôle de Paavo). Il meurt à Juva, dans le sud-est de la Finlande, le 22 juillet 1989. Peu avant sa disparition, il avait accepté le poste de directeur artistique de l'Opéra national finlandais, fonction qu'il devait exercer à partir de 1992.
Son physique impressionnant (2 mètres, 150 kilos !) le prédisposait à certains rôles comme Boris, Sarastro, Hunding ou Gurnemanz, que l'ampleur, la profondeur et la couleur sombre de sa voix soulignaient encore davantage. Mais il a également mené une importante carrière de concertiste, des chefs comme Otto Klemperer, Karl Böhm et, surtout, Georg Solti le demandant en oratorio (Les Saisons de Haydn, Missa solemnis de Beethoven, Symphonie no 8 « Des mille » de Mahler). Il savait aussi s'attacher aux formes miniatures et a notamment fait connaître les mélodies de Jean Sibelius et de Yrjö Kilpinen dans le monde entier.
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Écrit par
- Alain PÂRIS : chef d'orchestre, musicologue, producteur à Radio-France
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