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CRASSET MATALI (1965- )

Matali Crasset – matali crasset selon son code graphique – affirme un style qui traverse tous ses champs d'intervention : de l'objet, toutes typologies confondues, à l'architecture, en passant par l'art et l'architecture intérieure. Elle combine les couleurs vives en à plat, rarement primaires, les matières apparentes et les coupes franches.

Ses projets superposent l'artifice et le naturel, l'image infographique et la réalisation, au point de brouiller ce qui relève de l'écran de l'ordinateur et du réel. Sans être une passionnée des technologies de l'informatique et sans jamais parler technique, n'est-elle pas pour autant le prototype du designer à l'ère numérique ?

De l'objet au service, de la forme au scénario

Née en 1965 à Châlons-en-Champagne, Matali Crasset est diplômée en 1991 de l'École nationale supérieure de création industrielle à Paris qui se targuait, alors, d'embrasser les produits industriels « dans toute leur complexité ». Elle fait ses classes auprès de Philippe Starck à la direction de l'équipe de designers Tim Thom de Thomson. Matali Crasset n'en appartient pourtant pas moins à la première génération qui doit faire face à la désindustrialisation massive en France. À la financiarisation et à la délocalisation de la fabrication des objets fait écho, dans la nouvelle économie du design, une dépréciation tout aussi brutale de l'objet matériel au profit des services (Matali Crasset a su y trouver, à travers l'hôtellerie, un champ d'expérimentation privilégié). Dans la foulée, la forme de l'objet est délaissée au profit du « scénario d'usage » ou même du « scénario de vie », désormais placé sous la responsabilité du designer... Tout serait écrit d'avance ou mieux encore programmé, encodé. Mais il n'est pas aisé d'attribuer ces nouvelles prescriptions à tel ou tel individu, école ou organisation.

Dès la création de son atelier en 1998, plus encore que les couleurs, c'est son rythme hyperactif qui a fait de Matali Crasset un designer emblématique de sa génération. Sur son site en ligne, le passage d'un projet à un autre fut longtemps marqué par un clin d'œil de son effigie. Comme dirait Marcel Duchamp, il importe de dater l'œuvre de l'instant même où elle a été signée. Quelques titres, notamment les chaises, tables et chambre Instant (2009), témoignent de cette inscription. Ce rythme extraordinaire n'est pas celui de l'information, mais celui de l'informatisation. C'est le « temps réel », le temps de la simultanéité entre l'information et l'action dont parle Paul Virilio. C'est aussi le temps de prédilection des transactions financières. À l'heure de la financiarisation, l'informatisation pourrait bien dicter ses contraintes au designer comme le fit en son temps la mécanisation à l'heure de l'industrialisation. Mais pour l'instant, cet attelage de la mondialisation paraît hors de sa portée d'action, voire de compréhension. Il incite plutôt à un repli pragmatique sur le local et l'échelle humaine.

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Écrit par

  • : experte en design à la direction générale de la création artistique, ministère de la Culture et de la Communication, service d'inspection de la création artistique

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