MATÉRIAUX
La troisième génération
Nous sommes entrés dans la troisième génération (corrélativement, le monde devient désormais notre invention). Il en résulte aussi une autre civilisation industrielle (la communication, l'automatisation, l'informatisation électronique, les économies d'énergie, etc.). La cité scientifique même en sort secouée et obligée à des décloisonnements – entraînée par les nouveaux matériaux (les céramiques, les supraconducteurs, les monocristaux, les verres non silicatés, les eutectiques). La science de ces nouveaux « substrats » rassemble les physiciens du solide, les cristallographes, les électrochimistes, les polyméristes, ainsi que les mathématiciens de l'algèbre matricielle ou du calcul des tenseurs. Évoquons seulement quelques aspects de ces néo-matériaux. D'abord se multiplient actuellement les « composites ». Nous les distinguons des « composants », avec lesquels on les confond, encore que la séparation ne porte que sur des nuances. Ces derniers correspondent à un mélange, éventuellement celui de deux constituants de même nature. Le textile en relève : ne suppose-t-il pas deux fils identiques mais qu'on croise (la chaîne et la trame) ? De même, on peut user d'un bioadhésif, mais, au besoin, d'un durcisseur semblable à lui, qui en précipite l'action. Les composites (terme d'origine anglo-américaine) associent deux éléments différents (par leur nature, leur forme et leur fonction), de telle façon que l'union dépasse la somme des unités. Cette ruse technologique, qui potentialise, ne date pas d'aujourd'hui, si l'on accepte de ranger sous cette rubrique le béton armé ou le pneumatique qui inclut une carcasse en fils d'acier. Le bois lui-même, et par lui seul, ne conjugue-t-il pas des fibres de cellulose dans un bain de lignine ? À vrai dire, ces « mixtes » anciens miment les composites (des « pseudo ») plus qu'ils ne les réalisent, parce que, en eux, l'union ou la fusion ne va pas vraiment jusqu'à son terme. Les deux éléments se consolident mutuellement, mais subsistent séparés. L'industrie, au xxe siècle, s'emploiera à renouveler et à systématiser les associations-fusions – celle d'un « renfort » (des filaments, des fibres coupées, des micro-billes) et celle d'une matrice (un liant protecteur et enrobant). On veille surtout à la cohésion des deux, afin de prévenir les dislocations, les cisaillements ou même les déformations. C'est pourquoi on s'emploiera à briser les fibres du verre, par exemple ; de même, la présence de micropores favorise le profond couplage avec la résine enveloppante. On distingue encore ces composites des « complexes » qui se contentent de superposer des micro-feuilles (semblables ou différentes). Il s'agit alors plus d'une addition que d'une multiplication. Tout se complique avec l'existence des « structures sandwiches », qui s'apparentent aux complexes (une addition, donc), mais qui, toutefois, empilent des matériaux composites : elles mêlent ouvertement les deux genres – d'une part, la simple stratification, d'autre part, des substances modifiées, renforcées. Quant aux composites, innombrables, telles les fibres de verre-résines, ils s'imposent de plus en plus parce que plus légers et plus solides, de moindre coût et d'un usinage entièrement automatisé. Les fibres coupées, disloquées sont noyées dans un bain, ce qui nous vaut des matériaux qui résistent aux fortes tractions et compressions, à la température comme à l'humidité, à la fatigue et au vieillissement (on conçoit leur utilisation dans l'aéronautique, pour les propulseurs balistiques ou la fabrication de boucliers, les vastes réservoirs ou les cabines).
Autres échantillons de néo-matériaux : ceux qui appartiennent à la [...]
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Écrit par
- François DAGOGNET : professeur à l'université de Paris-I.
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