MATHEMATICAL PSYCHICS, Francis Ysidro Edgeworth Fiche de lecture
Une approche coopérative de l'échange
Mathematical Psychics est un ouvrage qui offre plusieurs niveaux de lecture, dont certains sont restés ignorés pendant près d'un siècle. On y trouve tout d'abord des concepts qui sont aujourd'hui à la base de l'analyse du choix du consommateur – comme les courbes d'indifférence, qui permettent de classer les combinaisons de biens selon la satisfaction qu'elles procurent. L'ouvrage marque aussi une avancée décisive dans l'analyse de la concurrence, en clarifiant la distinction désormais traditionnelle entre concurrence imparfaite et concurrence parfaite – cette dernière impliquant une « information libre » et la présence d'un « nombre infini d'individus ».
Surtout, l'approche d'Edgeworth repose sur un modèle de négociation de type coopératif, qui se situe à contre-courant de l'optique non coopérative dominante à l'époque. Cette dernière, illustrée par la théorie de Léon Walras, exclut les relations directes entre individus : elle suppose l'existence d'une institution dont la fonction est, d'une part, d'annoncer des prix que les individus considèrent comme des données lorsqu'ils déterminent leurs quantités de biens offertes ou demandées, et, d'autre part, de collecter ces propositions d'offre et de demande. Or le modèle d'Edgeworth permet d'éviter cette hypothèse puisque les agents y fixent eux-mêmes les prix à l'occasion de chaque négociation. C'est dans cette comparaison avec l'analyse walrassienne de l'échange que Mathematical Psychics prend toute sa dimension. Depuis le début des années 1960, de nombreux travaux soulignent l'identité des résultats obtenus selon ces deux approches et se concentrent notamment sur un théorème présenté à l'état de conjecture par Edgeworth : dans une économie comprenant un nombre infini d'individus et fonctionnant selon le principe de marchandage décrit par Edgeworth, la répartition des biens issue de l'échange est identique à celle qui aurait été obtenue si une institution walrassienne avait été en charge d'imposer des prix à ces individus. Mathematical Psychics a ainsi apporté aux théoriciens de l'équilibre économique la certitude que leur approche de l'échange marchand possédait une certaine unité.
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Écrit par
- Nicolas CHAIGNEAU : maître de conférences en sciences économiques
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