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AMALRIC MATHIEU (1965- )

En une vingtaine d'années, Mathieu Amalric est devenu l'acteur symbole de toute une génération du cinéma français, celle notamment d'Arnaud Desplechin et des frères Larrieu. Après de modestes débuts dans Les Favoris de la lune d'Otar Iosseliani (1984), il obtiendra le césar du meilleur espoir masculin en 1997 pour Comment je me suis disputé... (ma vie sexuelle), de Desplechin, celui du meilleur acteur en 2004 pour Rois et reine (du même metteur en scène), suivi d'un second en 2006, pour Le Scaphandre et le papillon, de Julian Schnabel.

Paradoxalement, jouer la comédie n'a jamais été la vocation de Mathieu Amalric. Il a fréquemment regretté que cette surabondance – plus de soixante films et jusqu'à sept prestations en 2005 ! – l'ait empêché de se consacrer à la réalisation. Mais, en 2010, il a reçu le prix de la mise en scène au festival de Cannes pour Tournée. Auteur, Mathieu Amalric ne l'était-il pas depuis longtemps, créant son propre univers au gré des films des autres ?

Né le 25 octobre 1965 à Neuilly-sur-Seine, Mathieu Amalric est le fils de Jacques Amalric, qui fit une longue carrière au service étranger puis à la rédaction en chef du Monde, de 1963 à 1993, avant de passer à Libération. Sa mère, Nicole Zand, fut critique littéraire au Monde. Le jeune Mathieu grandit dans un milieu où l'écriture est reine. Réaction naturelle : il ne découvrira les livres qu'après avoir quitté le domicile familial. Il rencontre vraiment le cinéma sur le plateau des Favoris de la luned’Otar Iosseliani, comme une activité artisanale, à la fois intellectuelle et très manuelle. En découle une boulimie de tournages qui le voient s'essayer à tous les postes accessibles : assistant à la réalisation ou au montage, régisseur, accessoiriste, cantinier... Et, évidemment, acteur. Au cours de sa carrière, il va explorer tous les types de cinéma et de cinéastes, de Jean-Claude Biette ou Luc Moullet à André Téchiné, Benoît Jacquot, Luc Besson, Alain Resnais ou Roman Polanski, en passant par Olivier Assayas, Xavier Giannoli, Nicolas Klotz, François Ozon, Bruno Podalydès, Jean-François Richet... Sans oublier un crochet hollywoodien chez Spielberg et Sofia Coppola, ou pour interpréter le rôle du « méchant » dans un « James Bond », Quantum of Solace (2008)...

« J'ai dû rater le train au départ et depuis je n'arrive plus à monter dedans », déclare le héros du Journal du séducteur (1995) de Danièle Dubroux. Introspection et autojustification rohmériennes qui annihilent toute velléité d'action comme pour le Paul Dédalus de Comment je me suis disputé... En lui confiant à quelques jours du tournage un personnage proche de ce qu'il a vécu, Arnaud Desplechin l'a « inventé en tant que comédien », dira Amalric. Ce personnage d'intellectuel déchiré entre le cérébral et le charnel poursuivra longtemps l'acteur (ainsi le Gabriel de Fin août, début septembre, d'Olivier Assayas, 1998). Mais Desplechin lui permet de s'en défaire dans Rois et reine, dans lequel Ismaël sort de l'enfermement au sens littéral. Jouer a permis à Amalric de vaincre sa timidité, exprimer la folie lui permet ici de s'extérioriser totalement, lui qui ne déteste rien tant que le conseil de « ne pas jouer » pour être « vrai ». Un rapport à la folie qui constitue le thème central d’un autre film tourné en 2013 avec Desplechin, Jimmy P. (Psychothérapie d’un Indien des plaines), avant de revenir au personnage de Paul Dédalus que le metteur lui a créé dans Trois Souvenirs de ma jeunesse (2015). Quant au rapport à la folie, il reste bien présent dans Les Fantômes dIsmaël (2017), où le protagoniste convoque les fantômes d’un passé qu’on croyait disparu.

Cette dimension physique du jeu de l'acteur, Mathieu Amalric la développe dans les films[...]

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Écrit par

  • : critique et historien de cinéma, chargé de cours à l'université de Paris-VIII, directeur de collection aux Cahiers du cinéma

Classification

Autres références

  • DESPLECHIN ARNAUD (1960- )

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    ...sont jamais ceux de Desplechin). Sur un fond de blessures sentimentales, amicales, professionnelles ou remontant à la petite enfance de Paul, le film, magnifiquement servi par le jeu d’Amalric, est une comédie parfois burlesque traversée de grands éclairs d’émotion. Avec la description de ce monde dépressif...
  • HANNIGAN BARBARA (1971- )

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    ...Strauss, Barber, Berg, Haydn, Mahler, Ives, Nono, Busoni ou Mozart. À partir de 2012, elle dirige une jeune formation hollandaise, le Ludwig Orchestra. Son compagnon, lecomédien et réalisateur Mathieu Amalric, lui a consacré un court-métrage intitulé C’est presque au bout du monde (2015).
  • TROIS SOUVENIRS DE MA JEUNESSE (A. Desplechin)

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    Trois acteurs différents prêtent leur apparence à Paul Dédalus : Mathieu Amalric en Paul adulte, évidemment, Antoine Bui pour l’enfant, le jeune Quentin Dolmaire pour le lycéen et l’étudiant. Ce dernier a le rôle ingrat de devoir s’imposer à côté d’Amalric tout comme Paul doit le faire sans cesse...