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MAURES ou MORES

Les Maures, dans l'Antiquité, occupaient la partie occidentale de l'actuel Maghreb. Ils subirent d'abord des influences phéniciennes par l'intermédiaire des comptoirs carthaginois. Organisés en tribus (Bavares, Baquates, Quinquegentanei...), ils se constituaient parfois en royaumes (les rois les plus connus furent Bocchus, Bogud, Bocchus II, Juba II et Ptolémée). Occupant les montagnes, ils pratiquaient le semi-nomadisme ; leur territoire fournissait à l'Empire de l'huile, des animaux pour l'amphithéâtre, de la saumure de poisson et de la pourpre. Ils conservèrent longtemps leur originalité culturelle (langues libyque et punique, onomastique indigène, cultes traditionnels : dieux maures, Saturne, litholâtrie, zoolâtrie, astrolâtrie, et variante schismatique du christianisme, à savoir le donatisme). Après la conquête, décidée par Caligula et effectuée par Claude en 42 après J.-C., leur territoire fut divisé en deux provinces procuratoriennes, les Maurétanies (et non Mauritanies) Césarienne et Tingitane, que séparait la vallée de la Moulouya. Rome instaura une zone défensive (limes) et développa les villes (Volubilis, Tanger, Tipasa, Cherchel...). Les rapports avec le pouvoir impérial furent complexes : la Maurétanie fournit des soldats et donna même un prince éphémère, Macrin ; la population admirait l'urbanisme ; mais il y eut aussi des révoltes (Aedemon dès 42, insurrections au milieu du iie s., au milieu du iiie s., en 290-293, tentative de Firmus à la fin du ive s.). Ces particularismes ont sans doute une explication : l'isolement géographique.

Jusqu'au viiie siècle de notre ère, au moins, le nom de Mauri fut appliqué aux habitants de la Berbérie ; et ceux-ci, après les Romains, en vinrent à se désigner ainsi eux-mêmes. La conquête de l'Espagne se fit sous la direction de chefs arabes, mais comme elle fut menée grâce aux troupes de Berbères islamisés levées dans tout le Maghreb, le nom de Mauri passa dans la péninsule avec les hommes et devint Moro, servant à désigner non seulement les Berbères mais aussi, à tort, les conquérants arabes.

Quelques musulmans, assez nombreux, choisirent de rester en Espagne après la Reconquista chrétienne, jusqu'en 1610, date de leur expulsion définitive. On les appelait alors Moriscos (Morisques ou Maurisques). En 1610, réfugiés en Afrique du Nord, ils reçoivent le nom d'Andalous (al-Andalus) par le phénomène inverse, alors que les chrétiens qui visitent la région continuent de leur appliquer le nom générique de Maure. L'appellation d'Andalou a persisté jusqu'à nos jours dans certaines manifestations culturelles propres à l'Afrique du Nord, un genre de musique, en particulier, dite musique andalouse et qui conserve des caractéristiques originales. Jusqu'à la fin du xixe siècle encore, on appelait Maures quelques noyaux assez peu homogènes de musulmans habitant certains ports méditerranéens de l'Afrique du Nord (Tanger, Oran).

— Yann LE BOHEC

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