BOURGÈS-MAUNOURY MAURICE (1914-1993)
Maurice Bourgès-Maunoury est né à Luisant (Eure-et-Loir) le 19 août 1914. Polytechnicien, licencié en droit et diplômé de l'École des sciences politiques, il choisit d'être officier d'artillerie de 1935 à 1940, par fidélité à son aïeul maternel Joseph Maunoury (1867-1923), maréchal de France à titre posthume pour avoir, en gagnant la bataille de l'Ourcq, permis — en 1914 — la victoire de la Marne. En 1943-1944, il fut adjoint du délégué militaire national Jacques Chaban-Delmas et sut alerter l'état-major du général Kœnig, chef des F.F.I., sur la « situation morale inquiétante » des maquis mobilisateurs laissés sans armes après leurs actions du début de juin 1944.
Sous-chef d'état-major de la défense nationale en octobre 1944, il succéda à Jacques Soustelle comme commissaire de la République à Bordeaux, du 26 juin 1945 à mars 1946. Il fut ensuite, jusqu'en 1958, député radical de la Haute-Garonne et se fit remarquer à la commission des finances de l'Assemblée avant d'être secrétaire d'État au Budget en 1947 et ministre des Finances du cabinet René Mayer en 1953. Ministre des Travaux publics en 1950, secrétaire d'État à la Présidence du Conseil en 1950-1951, ministre de l'Industrie et du Commerce puis des Forces armées dans le cabinet Mendès France (1954-1955), il s'occupa longuement des affaires militaires comme secrétaire d'État à la Guerre et à l'Air en 1948, ministre adjoint de la Défense nationale (1951), ministre des Forces armées (janv.-févr. 1955), ministre de la Défense nationale et des Forces armées du gouvernement Guy Mollet, de février 1956 à juin 1957.
Dans ce dernier poste, partisan de l'Algérie française, il couvrit les pratiques des tortures systématiques mises en œuvre pendant et après la bataille d'Alger. Il fit aussi arrêter le journaliste Claude Bourdet pour « tentative de démoralisation de l'armée ». Le 24 mars 1957, le secrétaire général de la préfecture d'Alger, Paul Teitgen, put écrire : « J'ai acquis la certitude, depuis trois mois, que nous sommes engagés dans l'anonymat et l'irresponsabilité qui ne peuvent conduire qu'aux crimes de guerre. » Mais le ministre continua sa croisade contre la démoralisation en faisant inculper Jean-Jacques Servan-Schreiber et en mettant aux arrêts de rigueur le général Paris de Bollardière, auteur d'une lettre dans L'Express où était dénoncé « l'effroyable danger qu'il y aurait [...] à perdre de vue, sous le prétexte fallacieux d'efficacité immédiate, les valeurs morales qui seules ont fait jusqu'à présent la grandeur morale de notre civilisation et de notre armée ».
Devenu président du Conseil le 12 juin 1957, Maurice Bourgès-Maunoury persévéra dans la défense, par tous les moyens, de l'Algérie française. Il se fit voter, le 19 juillet, des pouvoirs spéciaux pour l'Algérie et institua en métropole des camps d'internement dont le remplissage ne pouvait être contrôlé, ni légalement ni politiquement. Investi par 253 voix contre 240, le président Bourgès-Maunoury dirigea, du 12 juin au 30 septembre 1957, un des gouvernements les plus fragiles de la IVe République et le plus nombreux, avec 46 portefeuilles dont 25 pour des ministres d'État en raison de dosages politiques complexes. Son cabinet, sans ministre M.R.P., fit adopter le 9 juillet, par 340 voix contre 236, la loi validant l'existence du Marché commun et de l'Euratom. Il chuta, à la majorité relative de 279 contre 253, sur une loi-cadre sur l'Algérie qu'un de ses ministres — A. Morice — refusait de contresigner. Comme nombre des vingt-sept gouvernements de la IVe République décrits par Paul Reynaud, son cabinet ressemblait « à une miniature de Parlement, avec une majorité, une minorité[...]
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Écrit par
- Charles-Louis FOULON : docteur en études politiques et en histoire, ancien délégué-adjoint aux célébrations nationales (ministère de la Culture et de la Communication)
Classification
Média