Abonnez-vous à Universalis pour 1 euro

BOUTET DE MONVEL MAURICE (1851-1913)

Né à Orléans dans une famille qui comptait des comédiens et des musiciens, le jeune Maurice n'a pas de difficulté à faire admettre sa vocation de dessinateur et suit les cours de Cabanel et de Boulanger, ce qui explique l'académisme de sa formation où l'accent est mis sur la conception graphique du sujet. Avec Carolus-Duran, dont l'utilisation de la couleur est alors jugée révolutionnaire, il complète son itinéraire qui le mène à la peinture d'histoire et au genre orientaliste. C'est pourtant dans ses portraits d'enfants qu'il rencontre le plus de succès. Pour gagner sa vie de père de famille, il collabore à diverses publications de la maison Delagrave, essentiellement au journal pour enfants Saint-Nicolas qui paraît de 1880 à 1914. Ses dessins, pleins d'humour et d'élégance, sont si appréciés qu'il conçoit lui-même l'idée d'un album de chansons en couleurs, édité par Plon en 1883 sous le titre Vieilles Chansons et Rondes pour les petits Enfants. Les commandes affluent alors et sa célébrité est reconnue jusqu'aux États-Unis, où il se rend pour accompagner une de ses expositions, cependant que la critique viennoise salue son importance dans la formation des jeunes illustrateurs, attestée par sa participation à la Sécession de Vienne en 1899. Il meurt sans avoir pu terminer les fresques relatant la vie de Jeanne d'Arc pour la cathédrale de Domrémy. Les articles publiés au lendemain de sa mort insistent avec raison sur la valeur et l'originalité de son œuvre d'illustrateur de livres d'enfants qui l'emporte de loin sur son activité de peintre et qui lui a offert l'occasion d'affirmer sa technique et de trouver le style qui le fait apprécier aujourd'hui.

Boutet a lui-même défini sa manière comme un processus d'élimination et de sélection afin de conserver juste ce qui est nécessaire au caractère de l'image : « exprimer beaucoup avec le mince contour au crayon ». Son adhésion à la Société des aquarellistes — après le scandale provoqué par sa toile antirépublicaine L'Apothéose — l'incite à se consacrer à l'illustration pour enfants et à publier une série de chefs-d'œuvre. Avec chacune des Fables choisies de La Fontaine (1888), il adopte un découpage en séquences qui rompt avec la tradition de la vignette dramatique superbement servie par Grandville et Doré. Il se met à la portée des enfants avec un instinct très sûr : répétition rythmée du même motif, diversité des postures des protagonistes, utilisation de la double page qui repose l'œil grâce à la bonne répartition des blancs, réduction du décor à un élément unique (les joncs dans La Grenouille et le Rat). La version de Boutet redonne à un classique usé une fraîcheur d'inspiration et une vivacité narrative exemplaires. Fables, chansons, scènes de la ville et de la campagne, manuel de civilité... Boutet entre de plain-pied dans un répertoire ressassé qu'il parvient à renouveler par ses qualités de finesse, d'humour et une mise en pages pleine de trouvailles qui tient compte des leçons de maîtres contemporains anglais comme Walter Crane ou Kate Greenaway. Il procède souvent par allusion en utilisant l'efficacité du contraste de situations : par exemple, La Civilité puérile et honnête (1887) oppose malicieusement, en deux pages consécutives, la négligence vestimentaire de petits paysans aux champs et la saleté sans excuses d'un petit garçon qui « orne » de ses mains noires un intérieur bourgeois. Boutet observe avec acuité et amusement le monde de l'enfance pour en restituer ses divers aspects bien que ses albums aient visiblement été conçus pour les classes aisées où leur rapide propagation est attestée par une toile de Renoir de 1884 intitulée L'Après-midi des enfants à Wargemont[...]

La suite de cet article est accessible aux abonnés

  • Des contenus variés, complets et fiables
  • Accessible sur tous les écrans
  • Pas de publicité

Découvrez nos offres

Déjà abonné ? Se connecter

Écrit par

Classification

Autres références

  • MARS MAURICE BONVOISIN dit (1849-1912)

    • Écrit par
    • 609 mots

    Dessinateur belge, né à Verviers, mort à Menton, Maurice Bonvoisin appartient au milieu des filateurs, et sa formation initiale le prépare à diriger les usines familiales. Doué d'un crayon infatigable et d'un sens méticuleux de l'observation, bon portraitiste, il entre dans la presse illustrée, son...