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GANDILLAC MAURICE DE (1906-2006)

Figure importante de la vie philosophique française au xxe siècle, Maurice de Gandillac est né à Koléa, en Algérie, d'une famille d'origine périgourdine. Il entre à l'École normale supérieure en 1925 et passe l'agrégation de philosophie en 1929. Il y est le condisciple entre autres de Jean-Paul Sartre, Raymond Aron, Georges Canguilhem, Maurice Merleau-Ponty, Jean Hyppolite, et a comme maîtres Léon Brunschvicg, Étienne Gilson, qui l'oriente vers l'étude de la philosophie et de la théologie médiévales, Jacques Maritain et Gabriel Marcel.

De nombreux séjours en Allemagne, motivés par la préparation de sa thèse sur Nicolas de Cues, vont lui permettre d'acquérir une connaissance de la langue et de la pensée de ce pays qu'il utilisera par la suite dans son activité de traducteur. Après avoir enseigné à l'université de Lille, il est nommé en 1946 professeur à la Sorbonne, où il restera jusqu'à sa retraite, en 1977.

Historien des idées, il laisse plusieurs livres qui firent date, et surtout de très nombreux articles, communications et participations à des ouvrages collectifs dont les plus significatifs furent rassemblés dans le volume Genèses de la modernité (1992). Ces textes portent essentiellement sur certains courants peu connus de la pensée médiévale, avec leurs racines dans l'Antiquité tardive et leurs prolongements à la Renaissance. Auteur d'une étude fondamentale sur La Philosophie de Nicolas de Cues, parue en 1941, Maurice de Gandillac s'attacha particulièrement à la tradition néo-platonicienne qui mêlait des éléments mystiques à des intuitions hardies, anticipant sur ce qui allait constituer la modernité. Il consacra ainsi un livre à Plotin, traduisit et présenta les œuvres du Pseudo-Denys l'Aréopagite et celles d'Abélard, et publia plusieurs études sur les « mystiques rhénans », Maître Eckhart, Tauler, Suso, ainsi que sur Charles de Bovelles et Lefebvre d'Étaples. Un Dante philosophe et le très gros chapitre paru dans le tome II de l'Histoire de la philosophie de l'Encyclopédie de la Pléiade sous le titre « La Philosophie de la Renaissance » (1973) témoignent de l'importance qu'il accordait à la philosophie italienne. Quant à la pensée allemande des xixe et xxe siècles, elle constitue l'autre pôle principal de ses intérêts, principalement à travers la traduction de textes majeurs de Hegel, Novalis, Nietzsche, Franz von Brentano, Max Scheler, Ernst Bloch, Walter Benjamin.

Cette énumération non exhaustive des œuvres d'un historien des idées au vaste savoir, à l'érudition précise et au jugement sûr, ne rend pas compte de la totalité de la participation de Maurice de Gandillac à la vie intellectuelle de son temps. Ses souvenirs, évoqués dans Le Siècle traversé (1998), permettent de suivre son évolution, qui le voit subir l'influence des idées maurrassiennes avant de s'orienter vers le catholicisme social de Robert Garric, se rapprocher de Jacques Maritain, collaborer à la revue des Dominicains, Sept, et participer aux débuts de celle d'Emmanuel Mounier, Esprit.

Après la guerre, sa position universitaire lui permit d'être en contact avec de nombreux jeunes philosophes, et de s'intéresser à eux avec une rare ouverture d'esprit, croisant le chemin de ceux qui allaient être des figures marquantes de la philosophie française dans les années 1970, Gilles Deleuze, Jacques Derrida, Michel Foucault, Louis Althusser, Jean-François Lyotard.

Cette liberté intellectuelle, cette capacité d'accueil trouvèrent leur parfait lieu d'exercice à Cerisy, quand fut reprise, après la guerre, la tradition des célèbres décades de Pontigny créées en 1910 par Paul Desjardins. À Cerisy, pendant plusieurs dizaines d'années, Maurice de Gandillac fut l'animateur infatigable de colloques philosophiques et littéraires[...]

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Écrit par

  • : maître de conférences honoraire à l'université de Paris-X-Nanterre

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