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HERZOG MAURICE (1919-2012)

Maurice Herzog - crédits : Alexis Duclos/ Gamma-Rapho/ Getty Images

Maurice Herzog

Alpiniste glorieux puis politicien ambitieux, vainqueur de l'Annapurna, « premier 8 000 », en 1950 puis secrétaire d'État compétent du général de Gaulle, Maurice Herzog fut un héros de la France d'après guerre encore marquée par les heures sombres de l'Occupation. Il sut parfaitement faire fructifier son exploit, quitte à rejeter dans l'ombre son compagnon de fortune et d'infortune, Louis Lachenal.

Maurice Herzog est né le 15 janvier 1919 à Lyon dans un milieu aisé. Diplômé de l'École des hautes études commerciales, il se prend de passion pour l'alpinisme et passe son temps libre à escalader les parois des Alpes, au-dessus du chalet familial, à Chamonix. Durant la Seconde Guerre mondiale, il rejoint la Résistance et participe à la campagne des Alpes (1944-1945) au sein du 27e bataillon de chasseurs alpins. En 1949, dans une France morose en quête de rêve et de rédemption, dont les soldats tombent en Indochine, l'idée d'une expédition dans l'Himalaya prend corps : quoi de plus beau, en effet, que de voir des Français se hisser les premiers en haut d'un sommet de plus de 8 000 mètres ? Forts de l'autorisation du maharaja du Népal tout juste libéré de la tutelle britannique, huit alpinistes français partent pour Katmandou le 30 mars 1950, avec pour objectif de conquérir l'Annapurna (8 078 m). Parmi eux, le charismatique Maurice Herzog – désigné chef de l'expédition par le Club alpin – et les meilleurs guides de montagne – Lionel Terray, Gaston Rébuffat, Louis Lachenal... Le 17 mai, l'expédition se trouve au pied de l'Annapurna ; le 21, on décide que l'Annapurna sera attaqué par la face nord ; cinq camps sont établis tous les 500 mètres d'altitude. Le 3 juin, Maurice Herzog et Louis Lachenal, transis de froid, parviennent au sommet, sans carte et sans oxygène. La descente est pour eux un calvaire : pieds et mains gelés, ils sont amputés de plusieurs phalanges par le docteur de l'expédition, Jacques Oudot, au fur et à mesure du pourrissement de celles-ci, pour éviter la septicémie. « Notre exploit devait être celui de la nation, nous grimpions avec au cœur la pensée du pays et de toute la jeunesse que nous représentions », dira Herzog. « Je ne devais pas mes pieds à la jeunesse française », contredira Lachenal...

Mais la France se cherche des idoles : l'exploit de Maurice Herzog et de Louis Lachenal, qui relève tout autant de l'aventure, de l'épopée, de la performance sportive, du dépassement de soi, du risque, de la souffrance extrême, du patriotisme même, réunit tous les ingrédients pour que les deux alpinistes deviennent ces nouveaux « héros français ». Une célèbre photo parue à la une de Paris Match, montrant Maurice Herzog en haut de l'Annapurna tenant un piolet auquel il a accroché un petit drapeau français, résume l'histoire : Herzog – le photographié – va être ce héros ; Lachenal – le photographe – sera rejeté dans l'ombre... Maurice Herzog publie en 1951 le récit de l'expédition : Annapurna premier 8 000 ; douze millions d'exemplaires du livre, traduit dans une quarantaine de langues, sont vendus. L'année suivante, le film Victoire sur l'Annapurna de Marcel Ichac, un des membres de l'expédition, ajoute encore à la gloire de Maurice Herzog. Louis Lachenal meurt en 1955 dans une crevasse de la vallée Blanche, dans le massif du Mont-Blanc, en exerçant son métier de guide de montagne ; ses Mémoires, Carnets du vertige, paraissent en 1956 – mais le livre est réécrit et cosigné par Gérard Herzog, le frère du « vainqueur de l'Annapurna », qui supprime les nombreux passages concernant la conquête de l'Annapurna trop valorisants pour Lachenal.

En 1958, le général de Gaulle, de retour au pouvoir, cherche des hommes[...]

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Écrit par

  • : historien du sport, membre de l'Association des écrivains sportifs

Classification

Média

Maurice Herzog - crédits : Alexis Duclos/ Gamma-Rapho/ Getty Images

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