LE ROUX MAURICE (1923-1992)
Si le concept rabelaisien de l'« honnête homme » semble incompatible avec l'immensité du savoir moderne, Maurice Le Roux a montré qu'il pouvait encore s'appliquer à la musique : chef d'orchestre, compositeur, musicographe, passionné d'audiovisuel, il a occupé des responsabilités importantes dans la vie musicale française et fait tomber des barrières qui en paralysaient le fonctionnement.
Il naît à Paris le 6 février 1923 et effectue ses études musicales au Conservatoire entre 1944 et 1952. Il travaille le piano avec Isidore Philipp et Yves Nat, la direction d'orchestre avec Louis Fourestier et l'analyse avec Olivier Messiaen. Puis, il se tourne vers René Leibowitz, qui l'initie au dodécaphonisme, et reçoit les conseils du chef d'orchestre Dimitri Mitropoulos. Il commence une double carrière de compositeur et de chef d'orchestre à la fin des années1940. À partir de 1951, il travaille au studio de musique concrète de la R.T.F. Entre 1960 et 1968, il est directeur musical de l'Orchestre philharmonique de l'O.R.T.F., puis il est conseiller musical à l'Opéra de Paris (1969-1973) et inspecteur général à la direction de la musique du ministère de la Culture (1973-1988). Le chef d'orchestre se fait remarquer par un répertoire en marge des sentiers battus : il dirige la première exécution intégrale en France de l'Orfeo de Monteverdi (1955) ; il révèle les Vêpres de la Sainte Vierge du même compositeur (1959) et est l'un des premiers à diriger la version originale de Boris Godounov de Moussorgski, ouvrage qui le fascinera et pour lequel il militera toute sa vie. Il fait connaître les œuvres des compositeurs de l'école de Vienne, de Varèse et de Xenakis ; il dirige la première exécution en France (1953) du Réveil des oiseaux et le premier enregistrement de la Turangalîla-Symphonie d'Olivier Messiaen.
Ses premières œuvres révèlent un talent de compositeur profondément original et novateur : la Sonate pour piano (1946), les Trois Psaumes de Patrice de La Tour du Pin (1948), Cahier d'inventions pour piano (1948). Il donne ensuite quelques partitions majeures : Le Petit Prince, un ballet plein de poésie (1949), des mélodies sur des poèmes d'Henri Michaux, Au pays de la magie (1951), Le Cercle des métamorphoses (créé par Ernest Bour au festival d'Aix-en-Provence, 1953), œuvre symphonique qui intègre une écriture sérielle totale (jusqu'aux nuances et aux densités harmoniques) dans le principe de la variation, Un koan pour orchestre (1973), partition inspirée de la philosophie zen (le koan étant un sujet de méditation proposé par le maître au disciple pour mieux pénétrer la pensée zen). Il signe également des musiques de scène pour Le Château de Kafka (1957) et Jules César de Shakespeare (1960), pour la Compagnie Renaud-Barrault. Mais il compose peu pour le concert et consacre l'essentiel de son temps à la direction d'orchestre et au cinéma : plus d'une vingtaine de partitions, notamment pour des films d'Albert Lamorisse (Crin blanc, 1952 ; Ballon rouge, 1955), Denys de La Patellière (Le Salaire du péché, 1956), Maurice Cazeneuve (Cette Nuit-là, 1958), François Truffaut (Les Mistons, 1958), Jean-Luc Godard (Le Petit Soldat, 1960), Michel Deville (Martin soldat, 1966), Walerian Borowczyk (Contes immoraux, 1975), Jean Marbœuf (Les Jardins secrets, 1978). Membre du jury du festival de Cannes en 1960, il siège à la Commission d'avance sur recettes (1975-1977) avant d'être nommé vice-président de la Commission d'aide à la diffusion (1977-1979) et membre de la Commission d'aide à la musique de film (à partir de 1979). Il se passionne aussi pour la télévision et produit sur la première chaîne, à partir de 1968, la série « Arcana — Connaissance de la musique », une des émissions musicales les plus suivies. Il donne des conférences[...]
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Écrit par
- Alain PÂRIS : chef d'orchestre, musicologue, producteur à Radio-France
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ORCHESTRE NATIONAL DE FRANCE
- Écrit par Alain PÂRIS
- 1 675 mots
- 2 médias
Le 18 février 1934, le ministre français des Postes, Jean Mistler, signe le décret fondant l'Orchestre national, un ensemble de quatre-vingts musiciens dirigés par Désiré-Émile Inghelbrecht. En imposant l'exclusivité, le règlement de l'orchestre remettait en cause la pratique des remplacements,...