TABARD MAURICE (1897-1984)
Maurice Tabard, photographe phare des années 1920 et 1930 en France, est mort à Nice le 21 février 1984. Né à Lyon le 12 juillet 1897 dans une famille de soyeux, Maurice Tabard fut initié très jeuneà l'art. À partir de 1903 et durant une dizaine d'années, il apprend le violon et, jusqu'à sa majorité, dans le cadre de la fabrique paternelle, il perfectionne ses talents de dessinateur et réalise de nombreux modèles de décors pour tissus. Pendant la Première Guerre mondiale, le jeune homme prend en charge l'entreprise familiale puis part pour les États-Unis où il travaille comme livreur pendant deux ans. C'est alors qu'il apprend la photographie, en 1918, au New York Institute of Photography, dans le cours d'Emil Brunel. Il est ensuite assistant au Bachrach Studio à New York puis travaille à Baltimore, Cincinnati et Washington. En 1927, il suit les cours de portrait du peintre Carlos Baca-Flor à New York et continue dans cette voie l'année suivante à Paris. Photographe indépendant, il travaille pour les magazines Jardin des Modes, Vu, Bifur, Art et décoration, Arts et métiers graphiques jusqu'en 1938. Ses portraits, ses images publicitaires et ses travaux de mode sont vite remarqués et, dès 1930, il organise le studio publicitaire de Deberny et Peignot. L'année suivante, il commence à travailler pour le cinéma et s'occupe du laboratoire de Pathé-Films avant de devenir photographe de plateau et reporter pour la Gaumont jusqu'en 1936. C'est alors qu'il réalise plusieurs films militants dans l'enthousiasme du Front populaire. Pendant l'Occupation, Tabard, installé en zone libre, travaille comme photographe indépendant. En 1946-1948, il rejoint l'équipe de Harper's Bazaarà la demande de l'éditeur Carmel Snow et voyage pour le magazine, en Angleterre et en Écosse notamment. C'est ensuite Alexey Brodovitch, le plus inventif des directeurs artistiques de presse qui lui commande des images pour le même magazine dont il a transformé la mise en pages. Parallèlement, Tabard travaille pour le Paul Linwood Gittings Studio à New York, avant de regagner Paris en 1950. Toujours indépendant, il réalise alors portraits et images de mode pour Femina, Elle, Silhouette, Marie-Claire, l'Album du Figaro, Paris-Match, entre autres. À partir de 1965, il abandonne la photographie et se consacre, pour son propre plaisir, à des travaux de laboratoire et à de nouvelles expérimentations qui incluent la couleur. Il quitte Paris pour le midi de la France en 1980. Ce n'est qu'en 1978, puis en 1983, que le Salon international de la photographie expose sesœuvres, mais dans des accrochages à chaque fois fort limités. Quelques mois avant sa mort, en décembre 1983, il reçoit le grand prix national de la photographie qui, outre une reconnaissance officielle, marquait vraisemblablement le début de la mise en valeur de la photographie française des années 1920 et 1930, moins connue que ses homologues allemande ou italienne qui s'étaient constituées en écoles.
Victime de ses allées et venues entre la France et les États-Unis, appartenant à une génération qui fourmille de photographes de talent mais qui ne s'est jamais constituée en mouvement organisé, longtemps dédaigné parce que pratiquant cette « photographie appliquée » de mode et de publicité que l'on a opposée si longtemps à celle, considérée comme plus noble, des reporters ou des artistes, Tabard reste un méconnu. Pourtant, son sens de l'expérimentation, son amour des jeux d'images, sa maîtrise parfaite de techniques aussi savantes que les solarisations, les doubles expositions, ses jeux sur le négatif et le positif joints à une rigueur formelle sans cesse tentée par le surréalisme en font l'un des meilleurs représentants français de cette période de l'entre-deux-guerres qui refusait, tout en s'en inspirant, les formalismes des écoles[...]
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Écrit par
- Christian CAUJOLLE : directeur artistique de l'agence et de la galerie Vu, Paris
Classification
Autres références
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CHEFS-D'ŒUVRE PHOTOGRAPHIQUES DU MOMA. LA COLLECTION THOMAS WALTHER (exposition)
- Écrit par Armelle CANITROT
- 1 109 mots
- 1 média
...Les artistes se mettent en scène avec le dispositif photographique, valorisant le caractère mécanique de l’objectif comme un troisième œil. Le Français Maurice Tabardlivre son Autoportrait avec Roger Parry, appareil « vissé » sur l’œil (vers 1936). L’Allemand Ewald Hoinkis piège son reflet et celui de...