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TUBIANA MAURICE (1920-2013)

Médecin cancérologue français, Maurice Tubiana, né à Constantine (Algérie) le 25 mars 1920, décédé à Paris le 24 septembre 2013, est connu pour avoir développé en France, à partir des années 1950, l’usage de la radiothérapie moderne pour lutter contre les cancers.

Après des études secondaires effectuées à Alger, Maurice Tubiana part pour la France métropolitaine à l’âge de dix-sept ans. La Seconde Guerre mondiale le surprend pendant son internat de médecine à Paris. Il s’engage alors dans la Résistance en rejoignant les Forces françaises libres en Afrique du Nord. Il participe en 1944 au débarquement de Provence. Maurice Tubiana termine son doctorat de médecine en 1945, et celui de physique en 1947, dans le laboratoire de Frédéric Joliot-Curie. Il s’intéresse déjà aux possibles utilisations médicales des radiations. Comme pour beaucoup de médecins de l’époque, un séjour postdoctoral aux États-Unis oriente sa future carrière. Dans le Lawrence Radiation Laboratory de Berkeley, il étudie la biophysique. Il comprend l’importance, en cancérologie (domaine qu’il a choisi), d’une approche rationnelle et scientifique de la maladie. Cette croyance forte dans la prédominance de la rationalité sur l’affectif et le subjectif et de l’approche scientifique des problèmes, sera son guide tout au long de sa vie.

De retour en France en 1950, Maurice Tubiana poursuit une carrière de chercheur et d’enseignant en biophysique et radiothérapie, conjointement à son activité de médecin cancérologue. Il intègre en 1952 l’Institut Gustave-Roussy à Villejuif (Val-de-Marne) où il accomplira une grande partie de sa carrière, allant jusqu’à assurer la direction de celui-ci de 1982 à 1989. Il contribue à la mise au point des célèbres « bombes » au cobalt, utilisées pour la radiothérapie à distance. Sur le plan strictement médical, on lui doit en particulier les premiers succès dans le traitement de la maladie de Hodgkin et de certaines leucémies. Il devient, et restera, un ardent propagandiste des différentes pratiques de la radiothérapie des cancers et a largement contribué à l’installation des appareillages nécessaires en France. Ses ouvrages consacrés à la radiobiologie et à la radiothérapie restent des ouvrages de référence.

Par ses travaux, Maurice Tubiana devient rapidement un personnage incontournable dans le champ de la cancérologie et, plus largement, de la médecine. Expert dans de nombreuses commissions, notamment auprès de l’Organisation mondiale de la santé (O.M.S.) et de l’agence internationale de l’énergie atomique (A.E.I.A.), il exerce une influence considérable non seulement dans sa spécialité mais également dans la réforme de la médecine (études et pratiques) en France et auprès de l’opinion publique. On peut dire, de ce point de vue, qu’il participe à la dédramatisation de l’énergie nucléaire et de ses conséquences, comme lors de l’accident de Tchernobyl de 1986. On a pu dire qu’il était lié au lobby nucléaire, ce qui est sans doute excessif ; il n’en est pas moins vrai que sa passion pour une approche scientifique des problèmes l’a certainement conduit à minimiser l’impact social et psychologique des craintes que le nucléaire inspire. Dans la même logique, il a été un ferme défenseur des O.G.M. (organismes génétiquement modifiés) et des pesticides, par opposition à l’« irrationalité » des attitudes de leurs détracteurs. On lui doit également de fermes récusations du rôle de l’environnement (sauf l’usage de l’alcool et du tabac) dans la genèse des cancers. Ses prises de position, fortement étayées, lui ont valu une réputation de médecin viscéralement attaché à la valeur du progrès scientifique, que le contenu de son dernier ouvrage Arrêtons d’avoir peur ! (2012) n’ira certainement pas démentir.

— Gabriel GACHELIN

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Écrit par

  • : chercheur en histoire des sciences, université Paris VII-Denis-Diderot, ancien chef de service à l'Institut Pasteur

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