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SCHELER MAX (1874-1928)

La sympathie et la personne

L'intuition émotionnelle vise et laisse apparaître non seulement les valeurs mais aussi les actes qui constituent la personne. De par l'unité irréductible de l'âme et du corps, nous saisissons dans les données sensibles – le sourire, la rougeur, les larmes – l'expression immédiate des vécus d'autrui. Scheler distingue, par des analyses subtiles, sympathie, participation, contagion, fusion affectives (Nature et formes de la sympathie). Dans la sympathie proprement dite, acte intentionnel qui saisit comme telle, par exemple, la douleur d'autrui, les vécus deviennent objets ; la connaissance d'autrui ne se fonde donc pas sur l'analogie avec le moi : la sympathie, l'amour, la haine ont leurs évidences propres. Le discernement affectif est au centre de la doctrine ; loin d'être aveugle, l'amour est la lucidité même : la personne se manifeste à lui dans la diversité de ses actes, il découvre la valeur de l'aimé, le sens des choses, les différences de valeurs ; pour lui, point d'esprit impersonnel qui embrasserait les personnes, car il vise en Dieu même une personne.

La personne n'est ni complexe de fonctions vitales, ni substance métaphysique, ni unité synthétique formelle ; elle diffère du moi, cet objet de perception interne ou d'observation psychologique, cette « idole de la connaissance de soi ». Pour en comprendre l'essence, il faut réfléchir sur ces actes intentionnels par lesquels nous saisissons essences, valeurs et personnes : la personne n'en est ni la collection ni la résultante, mais le sujet ; elle n'existe que dans ses actes et change avec eux. Son essence est individuelle, aussi les valeurs de personnes sont-elles les plus élevées. Les valeurs types de personnes – Le Saint, le génie, le héros, le chef, l'artiste – forment sans doute une hiérarchie, mais pour chaque personne Dieu a créé une valeur propre qui apparaît à la lucidité de l'amour.

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Max Scheler - crédits : ullstein bild/ Getty Images

Max Scheler

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