MAXIME LE GREC (1480-1556)
Devenu moine sous le nom de Maxime, ouvert au mouvement de la Renaissance et adversaire du courant « joséphien » de la troisième Rome, Michel Trivolis, né à Arta (Épire), se rendit d'abord en Occident pour s'y former à l'humanisme que les savants byzantins de la génération précédente y avaient développé. Il séjourna à Paris, à Florence, à Venise et à Padoue. Il se convertit sous l'influence de Savonarole, puis entra dans l'ordre de saint Dominique. Mais, bientôt de retour en Grèce, il devient moine à l'Athos sous le nom de Maxime. Il met au service de sa foi ses connaissances d'humaniste et réorganise les bibliothèques athonites. En 1518, il se rend en Russie à la demande du grand-prince Basile III. Il apporte de précieux manuscrits et se consacre à la traduction du psautier et à la révision des livres liturgiques. Des humanistes grecs sont venus à la cour de Moscou avec Sophie Paléologue, mère de Basile. Des savants et des artistes italiens les y rejoignent ; la Russie semble vouloir participer au grand mouvement de la Renaissance.
Mais ce mouvement est inacceptable pour la civilisation russe, figée dans l'isolement et qui procède à sa propre sacralisation par le mythe de Moscou comme « troisième Rome », orchestré surtout par les joséphiens (josifljane), disciples de Joseph de Volokolamsk. Contre ceux-ci Maxime appuie les hésychastes d'outre-Volga (nestjažateli), partisans de la pauvreté et de l'indépendance de l'Église et respectueux de la liberté d'esprit. Les joséphiens l'emportent en utilisant, contre les réformes liturgiques proposées par Maxime, la xénophobie du peuple et, contre son sens de la liberté spirituelle, la jalousie du grand-prince. Condamné en 1525 et en 1531, Maxime le Grec est soumis aux pires épreuves et emprisonné au monastère de Volokolamsk. Il continue cependant d'écrire de brefs ouvrages de spiritualité et de théologie (sur la spécificité de l'« orthodoxie » par rapport au judaïsme, à l'islam et au monde latin). En 1551, il est enfin libéré et finit sa vie, vénéré comme un confesseur, au monastère de la Trinité-Saint-Serge. Mais la Russie a refusé l'esprit critique et l'humanisme ; et l'Église russe s'est acheminée vers une symbiose avec l'État, ce qui la conduira à l'asservissement.
La suite de cet article est accessible aux abonnés
- Des contenus variés, complets et fiables
- Accessible sur tous les écrans
- Pas de publicité
Déjà abonné ? Se connecter
Écrit par
- Olivier CLÉMENT : agrégé de l'Université, professeur à l'Institut Saint-Serge de Paris
Classification